L'opération épervier fait du sur-place
Avant de s’envoler pour l’Europe au mois d’août 2008 pour
son dernier « court séjour privé », Paul Biya avait reçu entre autres à
l’aéroport de Yaoundé Nsimalen, le ministre d’Etat secrétaire général de la
présidence de la République, Laurent Esso et le délégué général à la Sûreté
nationale, Edgar Alain Mebe Ngo’o. Selon des sources bien introduites, le chef
de l’Etat aurait fermement instruit ses deux collaborateurs directs de tout
mettre en œuvre pour poursuivre les arrestations dans le cadre de l’opération
Epervier. Ces sources affirment sans vraiment nuancer que Paul Biya aurait
notamment cité deux noms. Un ancien ministre et un ancien directeur général.
Quelques jours avant de prendre l’avion pour New York où il participe à la 63è
session de l’Assemblée générale de l’Onu, le président de la République a reçu
en audience le vice Premier ministre, ministre de la Justice, garde des sceaux.
Si rien n’a filtré officiellement de cette rencontre avec Amadou Ali, des
observateurs avertis pensent que Paul Biya aurait procédé avec ce dernier à une
évaluation du processus. Une source proche du sérail affirme même que « le
chef de l’Etat a demandé au Minjustice d’accélérer les différentes procédures en
cours, et de renforcer leur crédibilité, face à une opinion publique qui semble
de plus en plus vouloir s’aligner sur la thèse de ceux qui parlent d’opération à
tête chercheuse ».
Seulement cinq juges d’instruction à Yaoundé
Il y a une semaine, l’ex-trésorier général payeur de Douala
et son ex-caissier ont été écroués à la prison centrale de New-Bell. Il s’agit
là des dernières arrestations entrant dans le cadre de la lutte contre les
détournements des fonds publics, même si cette affaire ne fait pas partie des
dossiers de l’opération Epervier que Amadou Ali pilote. Des sources proches de
la gendarmerie nationale affirment que les dossiers de l’opération Epervier qui
ont été confiés au secrétariat d’Etat à la défense (Sed) auraient déjà connu des
avancements considérables pour ce qui est des enquêtes préliminaires. « Nous
avons déjà fini de « cuisiner » les personnalités sur qui pèsent des soupçons de
détournements de fonds publics et de malversations financières dans le cadre de
dossiers qui nous ont été confiés. Maintenant, la suite de l’opération dite
Epervier comme vous l’appelez dans les médias, appartient aux différentes
hiérarchies respectives », affirme un officier supérieur.
Un magistrat en fonction au ministère de la Justice confie sous anonymat au
Messager : « Il ne faudrait pas que les gens pensent que l’opération Epervier
est bloquée. Au contraire. S’il faut parler de blocage, il s’agit, pour être
plus précis, d’un arrêt momentané. Il se trouve qu’il y a un problème important
de magistrats instructeurs à Yaoundé.»
Au Palais de justice de Yaoundé Centre administratif où est logé le Tribunal de
grande instance du Mfoundi, la juridiction qui accueille, pour ce qui est de
Yaoundé, les affaires relatives à l’opération Epervier, il n’y a que cinq juges
d’instructions dont trois seulement ont des bureaux. Sans véritables cabinets,
les deux autres squattant d’autres bureaux au parquet, au tribunal de première
instance ou encore à la Cour d’appel du Centre.
Quand on voit le nombre de dossiers de l’Opération Epervier, une soixantaine,
selon les confidences de Amadou Ali à notre confrère Jeune Afrique Economie, on
se demande alors ce que peuvent ces cinq juges d’instruction, qui instruisent
déjà au quotidien, de nombreuses affaires de droits communs ?
Au final, nos sources indiquent qu’il est envisagé non seulement un renforcement
du tribunal de grande instance de Yaoundé en juges d’instruction, mais aussi à
l’aménagement des structures, notamment les cabinets de juge d’instruction, pour
que ceux-ci puissent avoir un cadre de travail serein. Aussi, la mise en route
des procédures judiciaires liées à l’opération Epervier, dans sa nouvelle phase
devrait attendre encore un peu.
Source : Le Messager
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