Lors d’une session extraordinaire à Yaoundé de l’Assemblée Nationale Samedi dernier, les députés ont voté une loi sur la création d’une juridiction spéciale chargée de traiter les cas des détournements de fonds publics.
Un Tribunal criminel spécial sera donc créé à Yaoundé, et traitera à l’échelle nationale tous les cas de détournements de deniers publics. Il sera effectif dès que la loi sera promulguée par le chef de l’Etat, Paul Biya. D’après Amadou Ali, ministre de la Justice et Gardes des Sceaux, la loi devrait être promulguée dans la semaine.
Ce Tribunal spécial traitera tous les cas de détournements de fonds dont le préjudice sera supérieur à 50 millions de francs CFA, et jugera toutes les « infractions de détournements de deniers publics et les infractions connexes prévues par le code pénal et les conventions internationales ratifiées par le Cameroun », a déclaré Amadou Ali.
La création du Tribunal semble être le passage à la vitesse supérieure de l’Opération Epervier, qui a envoyé sous les verrous plusieurs anciens ministres ou directeurs généraux d’établissements publics comme les douanes ou le chantier naval. La pression a été mise sur le gouvernement avec le récent rapport de la Conac, commission anticorruption camerounaise qui a embarrassé son monde en pointant du doigt de nombreux ministères, notamment ceux des Finances et de l’agriculture.
La création du Tribunal a été globalement bien accueillie par la classe politique camerounaise, qui voit d’un bon œil la volonté d’endiguer la corruption et la mauvaise gestion des fonds publics, même si on aurait aimé voir une telle action arriver quelques années plus tôt ; Pierre Abanda Kpama, président du Manidem a déploré le « déphasage » entre l’entrée en vigueur du nouveau code et la mise en place du Tribunal.
Un point notamment fait ombrage et laisse dubitatifs les observateurs, c’est la possibilité d’abandon des charges si le prévenu rembourse les sommes détournées. Une régression de justice et une impunité aux détourneurs de fonds qui peuvent s’assurer la pérennité en remboursant les sommes, luxe que ne peuvent se permettre les criminels coupables d’autres types de délit.
Jean Njeunga, candidat à la présidentielle, avait pour sa part proposé pendant la campagne une idée en ce sens : relaxer les prévenus s’ils remboursaient au moins 70% des sommes détournées, avec interdiction d’exercer ensuite un poste dans la fonction publique.
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