Tenue d'une conférence épiscopale à Maroua
" Le drame (assassinat de l'abbé François Xavier Mekong) qui vient s'ajouter à
la liste déjà longue des assassinats des ecclésiastiques dans notre pays nous
pousse à nous interroger sur notre rôle d'éveilleur de conscience dans ce pays".
Ainsi parlait hier à l'évêché du diocèse de Maroua-Mokolo Samuel Kleda, le
vice-président de la conférence épiscopale nationale. L'archevêque coadjuteur de
Douala n'a pas manqué d'interpeller les autorités civiles et militaires du
Cameroun. Un pays qui selon lui bat le record en Afrique centrale en ce qui
concerne "le nombre de personnes tuées sans qu'aucune enquête digne de ce nom
soit venue élucider les circonstances de leur mort et l'arrestation des
coupables. Il est temps que la justice joue son rôle comme dans tout Etat de
droit qui se respecte. "
Un propos qui marquait ainsi l'ouverture solennelle des travaux de la conférence
épiscopale nationale du Cameroun. Une cérémonie qui intervenait après la messe
qui a été dite à l'aire sacrée de la paroisse Saint Jean de Djarengol Maroua,
dimanche dernier. Le cardinal Christian Tumi, célébrant principal de cette
eucharistie, donnait une onction à la rencontre annuelle des évêques du
Cameroun. Une rencontre axée cette année autour du thème du second synode des
évêques pour l'Afrique, " L'Église en Afrique au service de la réconciliation,
de la justice et de la paix. " Ce synode réunira cette année autour du Saint
Père, les évêques d'Afrique. C'est pour préparer cette rencontre d'octobre 2009
(du 04 au 25 octobre) avec Benoit XVI que la conférence épiscopale des évêques
est en conclave à Maroua. Et Philipe Stevens, l'évêque du diocèse de Maroua
Mokolo dans l'homélie qu'il a prononcé n'a pas manqué d'indiquer la posture des
évêques relativement aux questions de paix, de réconciliation et de justice.
Détournements
Pour lui en effet, " ce synode va se tenir dans un contexte de crise financière
internationale. Une crise qui n'est que la résultante de l'hypocrisie et de
l'orgueil fou des hommes qui sont appelés à gérer. " Le prélat va s'insurger
contre les détournements de deniers publics et la quête sauvage des bénéfices.
Des attitudes qui consacrent le triomphe de l'égoïsme abject de l'Homme. Mais
qui plombent malheureusement aujourd'hui le quotidien de milliers d'hommes et
femmes, sans défense. Il déroule pèle mêle, les cas d'injustice et de
frustrations qui ne permettent pas d'envisager de manière sereine la paix.
Philipe Stevens fait par ailleurs remarquer, que l'Eglise catholique qui est au
Cameroun s'est jusqu'ici positionnée comme avant-gardiste par rapport aux maux
qui minent aujourd'hui la société camerounaise. Il cite la publication de la
lettre des évêques en 1990 sur la crise économique au Cameroun et la lettre des
évêques de 2000 sur la corruption au Cameroun. Des lettres qui, de son point de
vue auraient pu permettre d'envisager des réformes conséquentes. Mais regrette
l'évêque de Maroua-Mokolo, " qui écoute les évêques ? Qui nous écoute ? Où sont
les cadres chrétiens ? Ce sont eux malheureusement qui se retrouvent dans les
détournements des fonds consacrés aux écoles, aux hôpitaux. Ils sont dans les
chaînes de corruption pour les marchés publics. Ce n'est pas juste. "
Les chrétiens, croit savoir Mgr Philippe Stevens " doivent choisir leur camp.
Celui d'Hérode ou des mages " en référence au texte de l'évangile selon Saint
Mathieu retenu pour ce dimanche d'épiphanie. Ce choix des chrétiens doit pouvoir
permettre de travailler pour le développement. Un développement qui passe selon
lui à l'Extrême Nord par une aide accrue aux jeunes qui ne doivent plus faire
des fixations sur la fonction publique. Mais aussi par une juste répartition des
terres entre éleveurs et agriculteurs, par la lutte contre le banditisme…et le
vol des richesses.
Ces travaux de la Conférence épiscopale auxquels prennent part une vingtaine
d'évêques en l'absence du président de cette instance Mgr Victor Tonye Bakot,
archevêque de Yaoundé, s'achèvent le 8 janvier prochain.
Source :
Mutations
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