Au Cameroun, les images utilisées respectent de moins en moins les moeurs.
Selon Antoine Marie Ngono, membre du Conseil camerounais des médias (Ccm), « la
dérive observée » dans l’utilisation de l’image dans les médias au Cameroun a franchi
le seuil du tolérable. « Il ne se passe
de jour sans que les journaux écrits, la
radio et la télévision ne nous servent leurs lots d’images obscènes, à la limite
du tolérable », regrette-t-il. Pire, « ces images sont diffusées à dessein aux heures
de grande écoute à la télévision ».
Samedi 03 mai dernier, Antoine Marie Ngono a fait un exposé sur la diffusion d’images
portant atteintes aux bonnes mœurs dans les médias camerounais lors de l’atelier
organisé par le Ccm sur les aspects éthiques et déontologiques de l’utilisation
des images dans les médias. Pour illustrer son propos, il s’est appuyé sur quelques
exemples récents puisés à la Crtv et dans les médias privés. « Le 25 avril 2008.
Journal télévisé de 20h30... Un éditorialiste se fend d’un papier sur la prise en
charge par la Fondation Chantal Biya, d’une fillette de 3 ans violée par un pédophile
de 23 ans […] Le contenu du papier nous conduit aux cimes de l’insoutenable
», relate
Antoine Marie Ngono. « Des images de la fillette sont diffusées avec le gros plan
sur son sexe endommagé par son bourreau. C’est l’horreur ». Pour lui, le journaliste,
auteur de ce reportage, s’est livré à une « monstruosité ».
La diffusion de ce reportage vient allonger la liste des dérives à la télévision
publique qui a « diffusé des images tournées dans les cellules de la direction de
la police judiciaire et montrant d’illustres détenus qui y séjournaient ». Il complète
la liste de la diffusion des images portant atteinte aux bonnes mœurs par des reportages
tournés dans les commissariats qui présentent « de présumés braqueurs en petite
tenue, des cartons avec leurs noms écrits au charbon de bois ou au feutre accrochés
à leur coup, des gendarmes braquant sur eux des mitraillettes ». Les chaînes de
télévision locales diffusent des images des malades mentaux, des enfants de la rue
installés au boulevard du 20 mai à Yaoundé. Ceux-ci sont vus à la télévision en
train de renifler de la colle forte. Les ébats qui entrecoupent les scènes des séries
télévisées constituent aussi des atteintes aux bonnes mœurs. Les polars, quant à
eux, sont devenus des vecteurs de violence, alors que les clips de certains musiciens
sont une atteinte à la pudeur. Les chansons suggestives ne sont pas en reste.
Dans cette atteinte à la pudeur, la presse écrite n’est pas exempte de reproche.
Un hebdomadaire de la place a publié, il y a quelques mois, des photos « d’un jeune au derrière fracassé par les excès d’un présumé homosexuel ». Un autre journal camerounais
a publié des photos des lesbiennes camerounaises tirées sur le net. L’on a aussi
vu à la une d’un autre hebdomadaire camerounais des images de deux hommes dans une
posture présumant des rapports intimes contre nature.
Lors de cet atelier, Jean Marc Soboth a fait un exposé sur les aspects éthiques
et déontologiques de l’utilisation de l’image. Boniface Forbin, le directeur de
publication de The Herald, s’est appesanti sur le code éthique du photojournalisme
de nos jours. Maître Manga Balbine, avocat au barreau du Cameroun, a exposé sur
la loi et les dérives de la presse liée à l’image. Selon Essama Essomba, le but
de cet atelier était de « sensibiliser les professionnels des médias camerounais
sur les questions importantes liées à l’image ». Car « l’image, selon l’usage qui
en est fait, peut valoriser ou détruire ». Le ministre de la Communication,
Jean
Pierre Biyiti bi Essam, a rappelé que l’image a une place centrale dans les médias
tant électronique d’audiovisuels ; elle a un contenu informatif et une fonction
esthétique. Mais son utilisation pose beaucoup de problèmes éthiques et déontologiques.
Déontologie de la photographie
Au terme de l’atelier du 03 mai dernier, les journalistes ont adopté une
charte déontologique de la photographie de presse au Cameroun. Les différentes désignations
de ce document comportent le genre d’images qu’il faudrait éviter : les images injurieuses,
dégradantes, images obscènes et ou pornographiques qui violent la dignité humaine
; les images choquantes ou violentes ; les images qui prononcent un verdict de culpabilité
; les images des présumés voleurs, violeurs, cambrioleurs, images fournies par les
forces de l’ordre ; les images de personnes ou d’enfants victimes de sévices et
de violences sexuelles ; des images sur la couleur de peau et scarifications ; les
images non libres de droit ou images copyright ; les images manipulées, transformées,
modifiées ou inventées, et les images sans indexation ou sans légende.
Source :
Le Messager
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