Les lions indomptables du Cameroun disputaient hier leur dernier match amical avant la coupe du monde face à la Serbie. Après une défaite 3 à 4, le bilan est bien sombre pour les quarts de finalistes de la dernière coupe d'Afrique : quatre matchs, deux défaites et deux nuls, huit but encaissés pour cinq inscrits.
Si l'on y regarde de plus près, on verra que les choses empirent : les lions ont encaissé respectivement aucun, un, trois puis quatre buts lors de leurs matchs successifs. Si au cas par cas, on trouvera une explication sensée du pourquoi du comment, force est de constater que le Cameroun n'a gagné qu'un match sur ses neuf dernières sorties.
On est bien loin des victoires consécutives enchaînées depuis l'arrivée de Paul Le Guen comme sélectionneur : les lions s'étaient offert l'Autriche, le Gabon, le Togo et le Maroc avant de complètement sombrer dès le coup d'envoi de la CAN : jeu approximatif, défense aux abois, attaque mal inspirée...
On a pensé qu'il fallait du temps à Le Guen pour prospecter, bâtir et apporter des certitudes à l'équipe nationale du Cameroun. Mais force est de constater que des certitudes, l'équipe n'en trouve pas. Et le sélectionneur ne semble lui-même pas en avoir. Alors qu'on pensait avoir vu l'équipe type face au Portugal, on a assisté à des changements face à la Serbie : si Eto'o suspendu a été logiquement remplacé par Webo, Achille Emana était sur le banc et avait laissé sa place à Vincent Aboukar... sur le côté droit.
Au milieu de terrain, Alexandre Song qui n'avait certes pas été au meilleur de sa forme depuis le départ des matchs amicaux, a été remplacé par... Nicolas Nkoulou, le patron de la défense centrale depuis la CAN. Joël Matip, alternative toute trouvée au joueur d'Arsenal, était sur le banc. Derrière, c'est Bassong qui évoluait à côté de Stéphane Mbia. Le brassard de capitaine, après Webo, Geremi et Eto'o, était cette fois-ci échu à Souleymanou Hamidou.
Résultat des courses, on n'aura jamais vu la même défense centrale deux fois de suite ; impossible de créer de la complémentarité dans une défense qui change sans cesse. Et cela se voit sur le terrain : individuellement, les joueurs sont bons, mais lorsqu'il s'agit de défense en zone ou d'alignement du hors-jeu, c'est la véritable débandade dans la défense des lions qui laisse passer les ballons au plus grand bonheur des adversaires.
Au final, on a l'impression que l'équipe du Cameroun est victime de sa polyvalence. En effet, Gaëtan Bong, Nicolas Nkoulou, Georges Mandjeck, Aurélien Chedjou, Geremi Njitap, Stéphane Mbia, auront tous ou presque joué à des postes différents lors des matchs amicaux ou pendant la CAN.
Cette polyvalence, rêve de tout entraîneur n'est pourtant pas dans le cas d'espèce bienvenue, et il semblerait que Paul Le Guen soit piégé par ses propres choix : face à la Serbie, Nicolas Nkoulou a été très bon au milieu de terrain. Juste dans ses choix, une conservation de la balle modeste et très peu de déchets. Que faut-il faire donc ? Priver le Cameroun de son meilleur défenseur pour le mettre au milieu de terrain, à la place d'Alexandre Song, le meilleur joueur du monde actuel à ce poste ?
Certes il faut tenter d'innover, mais il est des piliers qu'il ne sert à rien de bouger. Eto'o, Nkoulou et Alexandre Song sont les tauliers de cette équipe de par leurs performances chez les lions ou leur aura à l'international. Il aurait peut-être été plus judicieux de chercher à tirer le meilleur de ces joueurs en construisant l'équipe autour d'eux, plutôt que d'effectuer des permutations incessantes qui ne contribuent pas au mieux du groupe.
Patrick Mboma déclarait récemment que les lions n'étaient pas armés pour évoluer en 4-3-3. Force est de constater qu'il a raison, au moins sur le 4-3-3 de ce match. Vincent Aboubakar, attaquant de pointe n'a été que l'ombre de lui-même exilé sur le côté droit. Peinant à se mettre en évidence offensivement, il n'a jamais replié défensivement et abandonné le pauvre Georges Mandjeck qui a vu passer par son aile toutes les offensives serbes. Le boulevard sur le côté droit des lions créé par le mauvais placement d'Aboubakar n'a pas été comblé par la paire Nguémo – Makoun qui s'est exclusivement, du moins en première période occupée du côté gauche.
Résultat des courses, Mandjeck s'est souvent retrouvé face à 2 voire plus et n'a pas fait une seule montée. De ce côté là, les choses se sont un peu plus équilibrées avec le replacement de Nguémo et l'entrée d'Emana qui n'a pas rechigné aux tâches défensives. Mais ça n'en reste pas moins un poste qui ne convient pas au joueur du Betis qui est plus percutant et plus efficace en soutien des attaquants.
Pourtant, et ça devient une chanson, les lions ont et de loin livré leur meilleur match depuis de longs mois ; pour leur plus large défaite. Mais on a senti un manque de cohésion global, de solidité et de bloc équipe qui a permis aux Serbes de se régaler.
On a beaucoup couru du côté des lions, il y a eu de belles occasions, mais la sauce a une fois de plus tourné au vinaigre sur quelques détails : au delà de la faille de la défense et du côté droit, la paire Nguémo – Makoun n'a pas assuré, loin de là. Les joueurs de l'OL et du Celtic ont pourtant essayé, ont beaucoup couru, mais ont cruellement manqué de justesse dans les passes et ont souvent été dépassés dans les duels.
Il y a pourtant encore une fois de bonnes choses à tirer de cette rencontre. Benoît Assou-Ekotto a une fois de plus été monumental. Passeur décisif sur l'ouverture du score de Webo – identique au but face au Portugal –, le défenseur de Tottenham 3 passes est le meilleur passeur de l'équipe, et a participé à la majorité des actions dangereuses camerounaises.
Achille Webo, titularisé après son but face au Portugal, aura montré de bien belles choses : un joli doublé de la tête, une bonne présence offensive et surtout, beaucoup de kilomètres parcourus. Le joueur de Majorque, sur les deux derniers matchs, mérite amplement une place de titulaire avec trois buts en quatre matchs. Seulement, entre Eto'o, Emana, et Choupo Moting, qui pourrait céder sa place ? C'est un dilemme de taille auquel fait face Le Guen.
Choupo-Moting, moins en vue que face au Portugal aura néanmoins rendu une feuille propre. Toujours à l'aise techniquement, le joueur de Nuremberg a une facilité avec le jeu en première intention qui promet ; son premier but – de la tête comme Webo –, augure d'une prise de confiance encore meilleure pour l'attaquant.
A noter aussi, les cinq buts inscrits par les lions proviennent de centre sur les côtés ; un créneau à réellement exploiter par les lions qui utilisent trop peu les ailes. Face à la Serbie, chaque centre a été potentiellement dangereux alors que les tentatives dans l'axe ont échoué soit à cause d'une mauvaise passe ou d'une bonne intervention défensive.
Et enfin, la seconde période des lions, qui ont été conquérants, dominateurs et ont confisqué le ballon, avec beaucoup d'envie ; une domination à appréhender avec des pincettes puisque la Serbie avait déjà inscrit quatre buts.
Mais au final, l'impression qui prédomine est que l'équipe du Cameroun n'arrive pas à marquer plus de buts qu'elle n'en encaisse, et que Paul Le Guen ne sait toujours pas quelle équipe constitue son onze type.
Les images du match
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