Incroyable ! On a cru un instant à une émeute sur le pont du Wouri hier, jeudi 25 juin. La circulation est complètement bloquée dans la matinée. Impossible pour les usagers, les conducteurs et les éléments des forces de l'ordre, qui ont accouru quelques minutes plus tôt pour l'opération de sauvetage, de bouger. L'atmosphère est invivable. Les enfants pleurent dans tous les sens. Certaines femmes perdent connaissance. Elles sont immédiatement transportées sur un gros porteur où les forces de l'ordre essayent tant bien que mal de les réanimer. Les enfants, quant à eux, sont également transportés sur cet engin pour éviter d'éventuels incidents.
Les usagers mobilisés sur le trottoir s'agrippent de toutes leurs forces sur les garde-fous pour ne pas tomber dans le fleuve. Les journalistes ne savent plus à quel Saint se vouer. Certains essayent néanmoins de se frayer un chemin et à rebrousser chemin vers Bonabéri. Au lieu dit nouvelle route Bonabéri, les gros porteurs, les cars de voyage en provenance de l'Ouest Cameroun, sont stationnés. Les employés qui travaillent dans cette zone et qui ont terminé leur journée sont assis dans les stations services environnantes. Les éléments du 4e arrondissement de la police et ceux de la brigade de gendarmerie, veillent à la fluidité de la circulation.
Ce blocus est dû à une opération de sauvetage sur le pont. En effet, un véhicule a fini sa course dans les eaux du Wouri aux aurores. "Nous étions en mer aux environs de 4h lorsque nous avons entendu les bruits de fracas sur le pont. Lorsque nous avons jeté un coup d'œil, nous avons aperçu l'arrière d'un véhicule qui s'enfonçait dans le fleuve. Nous n'avons malheureusement pas bien identifié l'engin. Mais, nous certifions que ça ne peut pas être un cargo, comme d'aucuns le soutiennent depuis le matin", confie Maurice Wouakam, un pécheur rencontré ce matin dans sa pirogue. Cette affirmation remet en question certains témoignages recueillis quelques heures avant.
D'aucuns parlaient en effet d'un cargo avec, à son bord, une quinzaine de passagers. Les pêcheurs, qui ont assisté à la scène, alertent immédiatement les forces de l'ordre. Et depuis 6h, la circulation est perturbée sur le pont. L'escadron du Port autonome de Douala, les brigades de Deido, Bonabéri, New-Bell et le commissariat du 4e arrondissement sont descendus sur les lieux pour sécuriser le périmètre. Un premier tour est effectué en mer par l'armée marine. Mais, le commandant et ses hommes reviennent bredouilles sur les berges. Le véhicule sera néanmoins localisé. Toutefois, la marée étant haute, ces derniers vont repartir.
Pascal Ze Perimo, sous officier de la gendarmerie du port Nord affirme alors avoir retrouvé l'identification de la victime grâce à la plaque d'immatriculation qui flottait. "Le choc à dû être violent pour que la plaque d'immatriculation puisse s'échapper", soutient-il. Grâce à cette pièce, on va identifier le propriétaire du véhicule et les membres de sa famille. La victime, serait mariée et âgée de 34 ans.
Selon certains témoignages des membres de sa famille, il se rendait à Bonabéri où il allait chercher sa mère pour la conduire à l'aéroport de Douala. les deux allaient attendre un frère qui venait de l'Europe. Etant toujours attendu par les siens, il leur aurait dit quelques heures avant qu'il était à une fête. N'ayant pas de ces nouvelles, les membres de la famille vont être informés de l'accident sur le pont. La plaque d'immatriculation qui leur sera présentée à la brigade va confirmer leurs craintes.
C'est aux environs de 13h que la compagnie de palmiers de combat de Limbé ayant à son bord quatre plongeurs, arrive sur les berges du Wouri. On apprend que la marine navale du port de Douala n'a pu intervenir parce qu'elle n'a pas de matériel approprié pour une intervention de cette envergure. Le temps presse et rien n'est toujours fait. "Impossible pour les plongeurs d'intervenir. Nous attendons l'étal de basse mer. C'est-à-dire, qu'il y ait la renverse", explique un marin. C'est finalement à 15h15 que l'équipe commence son opération de sauvetage. Elle est dirigée par deux marins français. Notamment, un capitaine et un adjudant. Par ailleurs, la police maritime, l'armée marine et la gendarmerie, participent à l'opération. Ils sortent l'engin à 16h30mn. Sur le pont, on aperçoit une main tendue, visiblement blanchie par l'eau. A la vue de ce membre, la foule qui avait pris d'assaut le pont lance les cris de stupeur.
C'est une épave de couleur bleue que l'équipe sort. La dépouille est sortie du véhicule par l'équipe d'intervention. Le frère aîné de la victime, est inconsolable. Les plongeurs attachent soigneusement l'épave sur l'engin apporté pour la circonstance (le Poclain). Le conducteur le tire et le remet sur la chaussée. La dépouille y est également déposée. Vêtu d'un pantalon kaki, d'un sous vêtement blanc et d'une chemise bleue déboutonnée, la victime dont la main est toujours tendue a le ventre gonflé, prêt à exploser. La dépouille a été conduite dans un pick-up à la morgue de l'hôpital de Bonassama. Au moment où nous mettions sous presse, la circulation était toujours perturbée entre Bonabéri et Deido.
Source : Mutations
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