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Calixthe Beyala: " Les africains viennent souffrir en France "
(10/12/2009)
Même présente au Cameroun pour des raisons privées et douloureuses, la disparition de sa mère, Calixthe Beyala reste la célèbre écrivaine que l’on sait.
Par Stéphane Tchakam (Le Jour Quotidien)
Calixthe Beyala dans un entretien sans détour accordé au quotidien Le Jour.
Calixthe Beyala dans un entretien sans détour accordé au quotidien Le Jour.
Toujours prompte à monter au créneau pour, avec verve et faconde, dire son fait à chacun. Elle a désormais un nouveau dada: l'union africaine. Qui n'occulte pas les préoccupations de toujours: le Cameroun, la communauté noire de France, l'immigration... Rencontre à Douala.

Vous êtes tout le temps au Cameroun, est-ce simplement vos origines qui vous y ramènent à chaque fois ?

J’y ai mes racines, parce que parler d’origines, ce n’est pas forcément parler de racines. Je suis une femme très traditionaliste, même si je suis Française aussi, attention. Je suis une femme très traditionaliste et très liée à la Lekié, très liée à la pensée et à la civilisation du peuple eton ; ça, il faut quand même le dire. Souvent, je viens au Cameroun sans que personne ne le sache. Mais les gens de Sa’a savent toujours que je suis là. J’arrive au Cameroun et je me dirige directement vers l’endroit où mes ancêtres se sont installés autrefois, il y a des siècles. J’ai cette espèce d’attachement viscéral à cette tradition-là, à cette pensée-là que je pense très moderne. Généralement, quand on dit tradition, les gens pensent arriération mentale, culture arriérée, etc. Mais en réalité pour moi, j’ai trouvé dans la tradition ce qu’il y avait de plus moderne en l’homme, ce qu’il y avait de plus humaniste en l’homme. Donc, c’est pour cela que j’y suis très attachée. Je veux dire que je n’ai pas appris à être une femme libre en Europe, j’ai appris à être une femme libre au Cameroun. C’est curieux de dire ça, mais c’est ça la réalité. Chez le peuple eton, le matriarcat est quelque chose de très important. Les femmes sont très combatives, très dynamiques. C’est vrai que les gens sont souvent étonnés qui se disent : « mais où prend-elle sa force ? » Je puise ma force dans ces racines-là, dans ce village perdu d’Issogho, à quelques six kilomètres de Sa’a.

Ce Cameroun vous apporte-t-il quelque satisfaction sur le plan socioculturel, économique et politique ?

Le peuple camerounais, oui. Je suis très admirative de ce peuple dynamique, ce peuple brillantissime, ce peuple qui, partout où il s’installe à travers le monde entier, devient une élite. Même en France quand on parle des Africains brillants, vous verrez que 90% sont des Camerounais. Et ceci dans tous les domaines, que ce soit le domaine politique, économique, social ou culturel. J’ai une admiration sans bornes pour le peuple camerounais. Il est tout à fait évident qu’il y a eu des moments où j’ai été un peu déçue par la ville de Douala, par exemple, où les rues étaient cassées, où les hôpitaux ne fonctionnaient pas. J’ai eu une espèce de déception très forte parce que je me disais que nous avions les moyens de pouvoir bien scolariser nos enfants et les encadrer, que nous avions les moyens de les nourrir. C’était des points importants. Vous savez, moi je suis quelqu’un qui, à la limite, ne sait pas ce que ça veut dire le mot démocratie. Pour moi, la démocratie commence quand les peuples peuvent manger, se scolariser et se soigner. Un peuple nourri, sain et éduqué est libre. Ça veut dire qu’il réfléchit. Et pendant longtemps, j’ai eu des inquiétudes sur le Cameroun par rapport à ça. Et ces dernières années, j’ai vu une amélioration des systèmes, néanmoins. J’étais très inquiète pour les rues de Douala, qui étaient très sales. Quand je traversais la ville, je me demandais si l’on se rendait compte que les enfants pouvaient attraper le choléra, la dysenterie. Ce que je voyais pouvait provoquer une catastrophe, je dirais sanitaire. Là, je suis heureuse de voir que les pouvoirs publics ont mis en œuvre des moyens pour assainir la ville de Douala en particulier. Pour moi, c’est très important. Je ne demande que trois choses à un pays : l’alimentation des peuples, la santé des peuples et l’éducation des peuples. Le reste, ça vient après. Et tant qu’on n’a pas ça, ne me parlez surtout pas de démocratie, je m’en fous.

Comment prenez-vous le pouls fidèle du Cameroun à partir de Paris où vous vivez depuis si longtemps ?

Comme vous l’avez constaté, je viens très souvent au Cameroun. Et quand je suis là, je passe mon temps à Pk 5, à New Bell, dans les quartiers pauvres. Je passe plus de temps là-bas que dans les quartiers huppés. Je sais, par exemple, qu’il y a un taux de chômage très élevé au sein de la jeunesse camerounaise. Il faudrait absolument résorber ce chômage-là. Je sais également que les jeunes Camerounais aiment à être scolarisés, ça me fait plaisir. Les petits Camerounais aiment aller à l’école. Effectivement, dois-je reprocher à l’Etat de n’avoir pas assez créé d’emplois ? Je prends du recul en parlant. Je prends du recul parce que c’est un pays qui a connu un tel boom démographique. Et il aurait été difficile à n’importe quel gouvernement de pouvoir résorber tout ça. Je me souviens que dans les années 78, nous n’étions pas cinq ou sept millions. Là, on nous dit plus de 15 millions !

19 millions…

Je crois même que ça doit être plus que ça. Donc, il a fallu, en peu de temps construire énormément d’écoles, construire énormément d’hôpitaux. C’est vrai qu’en vieillissant, je deviens plus responsable. Je travaille aussi beaucoup maintenant avec des hommes politiques d’autres pays africains et européens. Je suis quand même dans des réseaux politiques importants dans le monde. C’est dire que je commence à être confrontée à bien des réalités et je pense que le Cameroun ne s’en sort pas si mal que ça. Je ne dis pas que tout est bien. Je dis qu’on ne s’en sort pas si mal que ça.

Paradoxalement, vous ne parlez pas de toutes ces questions dans vos romans. On a même le sentiment que certains écrivains africains francophones se détournent du continent, au profit de la diaspora : Mabanckou, Diome, Effa…

Je ne sais pas de quelle diaspora vous parlez, parce que moi je suis dans la diaspora africaine à Paris. Et je pense que je ne mens pas là-dessus. C’est moi qui ai lancé les premiers mouvements des Noirs de France pour manifester et réclamer. Et je continue d’ailleurs, puisque nous avons aujourd’hui des cercles très puissants de Noirs en France. Ces écrivains dont vous me parlez n’en font pas partie, je ne sais pas de quoi vous parlez. Je ne sais pas où ils vivent, peut-être parlent-ils aux Blancs seulement. Ce que moi je sais, c’est qu’aujourd’hui, je suis à la tête des plus grands mouvements noirs de France, avec des intellectuels, des hommes politiques et même des hommes d’affaires afro français, comme on dit. Le collectif Egalité, c’était moi, le club Elite qui a reçu dernièrement le président de l’Union africaine, c’est moi qui en suis la fondatrice et la présidente. A propos de ces écrivains dont vous me parlez, chacun fait son choix, finalement.

Quel est le vôtre justement ?

Mon choix, c’est que je suis une Africaine française. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que je prends mes racines en Afrique. Ça veut dire qu’autour de moi, personne ne pourrait insulter l’Afrique sans que je ne réagisse. Ça veut dire qu’autour de moi, personne ne pourrait jeter l’opprobre sur l’Afrique sans que je ne réagisse. Ça ne veut pas dire que je ne critique pas l’Afrique quand cela s’avère nécessaire, mais seulement vraiment quand c’est nécessaire. Cela veut dire que je suis aussi Française attachée à des valeurs républicaines que je combats aussi par moments. Puisque quand on nous dit liberté-égalité-fraternité, en France, il n’y a pas d’égalité. Or, s’il n’y a pas d’égalité, il ne saurait y avoir de fraternité. Voilà, je le dis. Mais, ça ne veut pas dire que je n’aime pas la France, attention ! Donc, c’est une nouvelle identité pour ces peuples africains français qui sont là et qui sont attachés à leurs racines. Moi, je ne vais jamais renier l’Afrique.

Pourquoi des sujets tels la démocratie ou les droits de l’homme, préoccupations en Afrique, ne sont pas des sujets visibles dans vos livres ? C’est d’autant plus curieux que vous avez quand même affiché Mongo Beti comme mentor…

Non, je n’ai jamais affiché Mongo Beti comme mentor. J’ai comme modèle et mentor Aimé Césaire, que j’ai rencontré à maintes reprises et qui me considérait comme sa fille.

Vous n’avez jamais cité Mongo Beti comme modèle ?

Si, mais je le cite comme un grand écrivain camerounais pour lequel j’ai eu énormément de respect, pour qui j’ai eu énormément d’admiration. C’est deux choses absolument différentes. Mais je trouvais que, même s’il est vrai que chacun mène le combat à sa manière, sa manière à lui était peut-être trop en avance sur le temps. Donc, je ne l’ai pas suivi. Pour moi, il fallait d’abord organiser la communauté noire de France pour qu’elle devienne une force qui puisse peser sur les décisions qui pouvaient être prises à l’encontre de l’Afrique ou pour elle. Et c’est le cas aujourd’hui. Et je pense que la question ne peut pas se résumer à taper sur tel ou tel gouvernement africain. Vous savez, la chance que j’ai eue par rapport à Mongo Beti ? Omar Bongo m’a fait venir pour me parler longuement quelque temps avant sa mort. Gnassingbe Eyadema, quelques années plus tôt, a fait exactement la même chose. Aimé Césaire aussi, d’ailleurs. Ces hommes m’ont parlé longuement. Ça ressemblait d’ailleurs à des testaments. Omar Bongo voulait même que je reste quatre jours, tant il avait des choses à me dire. En fait, on se rend compte que les premiers présidents africains étaient pris en otage en quelque sorte. Ils avaient les pieds et les poings liés par l’Occident. Leur taper dessus ne changeait rien. Il s’agissait de s’organiser autrement. C’est tout ce que je peux vous dire là-dessus.

Il n’empêche, en Afrique en particulier, vous passez pour un leader d’opinion dont on attend les prises de position…

J’ai des positions sur des sujets. Mais je ne fais pas partie d’un parti politique quelconque. Je suis une femme qui pense appartenir à tous les Camerounais, à tous les Africains, et qui est à leur écoute. Et je ne peux pas, moi, prendre parti pour un groupe, pour une tribu, pour ceci ou cela…

Mais, est-ce qu’il s’agit de cela ?

Souvent, en Afrique, c’est de cela qu’il s’agit. Et ça, ça ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse, c’est, quelque part, la vérité et la justice. S’il y a par exemple des élections au Cameroun, je ne vais pas prendre parti pour tel ou contre tel. Par contre, s’il y a de la misère au Cameroun, si l’on assassine au Sénégal, là, vous allez m’entendre. Je ne suis ni pour ni contre qui que ce soit.

Est-ce que finalement, de « C’est le soleil qui m’a brûlée » au dernier «Le Roman de Pauline», vous n’êtes pas davantage préoccupée par le pont à ériger entre vos deux cultures à vous ?

On ne peut pas dire que cela m’intéresse davantage. Puisque vous posez la question, je vais vous dire ce qui me préoccupe davantage. Ce qui m’intéresse davantage, c’est l’Union africaine. Ce qui m’intéresse davantage, c’est que les 53 Etats africains soient une seule et même nation, comme les Etats-Unis d’Amérique. Car, à partir de là, l’Afrique sera une grande puissance mondiale avec son milliard d’habitants. Je pense que c’est une extraordinaire bonne idée qu’il faut faire aboutir à tout prix.

Est-ce qu’on pourrait trouver cette idée dans un de vos livres à venir ?

Ça n’a aucun intérêt. Un roman n’est pas un pamphlet politique. Un roman est sensé faire rêver les gens, les faire voyager, les faire réfléchir.

Mongo Beti écrivait des romans, hein !

Il y en a de très mauvais aussi à cause de ces pamphlets.

C’est une lourde responsabilité que vous prenez là…

Je dis ce qu’il en est. J’ai du respect pour lui. Quand Mongo Beti se focalisait dans le roman, il était excellent. Dès lors qu’il se dirigeait vers le politique, il n’était pas bon. Moi, je sépare les deux domaines et je me bats pour qu’un jour les Etats-Unis d’Afrique naissent. Maintenant, si vous voulez me poser la question, je vous réponds clairement : la seule organisation que je soutiens en tant que tel, c’est l’Union africaine.

Qu’est-ce que vous ferez, en tant qu’écrivaine, pour que ce dessein se réalise ?

Je fais tout. Pour l’instant, je mobilise les intellectuels en Europe…

C’est une question d’intellectuels, l’Union africaine ?

De toutes les façons, on ne fait pas avancer les idéaux avec la masse. Ce sont quelques personnes qui portent la parole, et tous ces gens-là portent la parole à travers le monde. Et je peux vous dire que l’on est bien avancé, puisque l’intégration sous-régionale réalise des progrès. J’espère que vous êtes au courant.

En Afrique centrale aussi ?

Vous n’êtes même pas au courant ? Il y a désormais le passeport Cemac et on n’a plus besoin de visa pour partir du Cameroun pour le Gabon. Moi, je n’en ai pas eu besoin, il y a peu. En Afrique de l’Ouest, vous pouvez voyager sans problème, c’est à peine si’ l’on vous demande de présenter votre carte d’identité nationale. Et nous nous battons pour un passeport africain. C’est ça qui m’intéresse. Et je soutiens tout gouvernement africain qui va dans ce sens.

Voici une phrase tirée de votre avant-dernier roman «L’homme qui m’offrait le ciel» : «Que vont dire la presse et la France si on apprenait que j’ai quitté ma femme pour une femme noire ?» Y a-t-il une barrière rédhibitoire entre vos deux mondes ?

Sortie de son contexte, la phrase n’a pas d’intérêt.

Mais encore…

Puisque vous insistez, je vais vous dire : à la limite, je m’en fous. Vous savez, je n’ai jamais demandé que l’autre m’aime. Je fais une différenciation entre l’amour et le respect. Je demande à l’autre de me respecter. Je ne lui demande pas de m’aimer. C’est pour cela que je n’ai jamais été dans les mouvements comme Sos Racisme. C’est quoi, aller combattre le racisme chez l’autre ? Si quelqu’un doit combattre le racisme en France, c’est les Blancs eux-mêmes. Ils n’ont qu’à aller conseiller à leurs frères de cesser avec le racisme. Qu’est-ce que j’en ai à foutre, moi ? Ça n’a aucun intérêt. Je ne demande pas à quelqu’un qui ne me connaît pas de m’aimer. Je lui demande juste de s’écarter quand je circule pour me laisser passer. C’est l’attitude que j’ai toujours eue, différente de celle des autres intellectuels africains, qui ont toujours demandé à être aimés par les autres. Je leur dis souvent que je ne me présenterai jamais au concours de miss France, je ne demanderai jamais le bulletin de vote de quelqu’un, donc, ce n’est pas la peine. Je te déplais, tant pis pour toi. Tu es fâché, tant pis pour toi. Et je crois que cette position-là, on la connaît. Je demande le respect.

Est-ce que la France respecte les peuples qui sont venus se fondre chez elle ?

Pas vraiment, puisque aujourd’hui, on parle de l’identité nationale. C’est-à-dire que l’on en revient à des idées fascisantes, les idées du IIIè Reich, à ces débats qui ont eu lieu sous Hitler en Allemagne entre 1930 et 1933. Il faut le dire ! Un peuple qui s’interroge sur son identité est un peuple qui n’en a peut-être plus ou alors c’est un peuple qui veut exclure de manière automatique. Une identité n’est pas une réalité figée dans l’espace et le temps, une identité est mobile, c’est comme les planètes, ça évolue, ça bouge. Même mon identité à moi bouge, puisque je vieillis chaque jour un peu plus. Imaginez pour l’identité nationale. Elle est, elle n’est pas à définir. S’ils veulent la définir, ça veut dire qu’ils vont la figer et procéder à une exclusion systématique des autres civilisations qui sont venues s’y greffer. Et j’ai toujours dénoncé le ministère de l’Identité nationale et de l’Immigration, qui est un ministère de la honte, un ministère qui, au XXIè siècle, est un ministère absurde, de bêtise, de stupidité et du rejet de l’autre. Je l’ai toujours dit.

Dans votre tout dernier «Le Roman de Pauline», vous écrivez à propos d’une banlieue : «A Pantin, il est plus facile de gifler une nana que de lui dire je t’aime, plus facile de la violer que de lui dire je t’aime, plus facile d’aller lui cueillir des étoiles que de lui dire je t’aime». Qu’est-ce qui condamne les banlieues, réceptacles de l’immigration africaine et maghrébine, à cette violence et à ce désespoir?

Je ne peux plus parler de réceptacle de l’immigration, puisque nous en sommes déjà à plusieurs générations nées en France. Il ne faut pas les traiter d’immigrés. Parce qu’il y a très peu d’immigrés en France, en réalité. Après les violences dans les banlieues, il y a quelques années, ils ont dit qu’ils renverraient chez eux les enfants qui n’étaient pas Français, ils n’ont eu personne à renvoyer. Je vais vous dire : ces enfants noirs de France ne sont pas des petits Africains. Ce sont des Français à la couleur noire, attention. Ils n’ont rien à voir avec vous. Vous les mettez ici et ils sont complètement perdus. Evidemment, ils subissent des discriminations qui expliquent la violence mais ne la justifient pas.

Le Cv anonyme va-t-il arranger les choses pour les Aloga, les Camara et les Mouloud ?

Le Cv anonyme est la chose la plus curieuse. Quand j’ai créé le collectif Egalité à l’époque, j’avais proposé le concept de discrimination positive, qu’ils reprennent aujourd’hui à leur compte et en font n’importe quoi. Comme ils ne veulent pas mettre en place la discrimination positive, ils parlent de Cv anonyme. C’est une absurdité. La personne qui envoie son Cv anonyme ne va-t-elle jamais se présenter pour un entretien ? On va la recruter comment ? Donc, c’est impossible à appliquer. En fait, ils sont en train de maquiller le racisme. Le gouvernement ne voulant pas mettre en œuvre les discriminations positives, solutions à ces problèmes, trouve des petits machins qui ne servent à rien.

C’est toujours la patrie des droits de l’homme ?

Il faut séparer la France en tant qu’Etat et la France en tant que regroupement de communautés. En tant que regroupement, il existe une très grande paix entre les communautés. Il y a un fort métissage, je dirais génétique et non pas racial, parce que la race n’existe pas. En revanche, il existe un racisme étatique. Les plus grands racistes, vous n’allez pas les trouver au sein du peuple français, mais dans l’administration, dans l’élite. Et c’est ça qui nous pose problème.

On peut quand même s’interroger sur un peuple qui envoie un leader d’extrême droite au deuxième tour d’une élection présidentielle…

(Embarrassée)… Oui, mais bon… Je ne saurais condamner le peuple français. Ne m’amenez pas à ça. Parce qu’il y a une grande paix. Et puis, c’était 20% des voix.

Les sans papiers ne vous intéressent pas beaucoup…

En effet, je n’ai jamais travaillé sur les sans papiers. Je n’ai jamais encouragé à l’immigration africaine en Europe. Je crois aux Etats Unis d’Afrique, je ne peux pas encourager ça. On va voir un continent dix fois plus grand que l’Europe être habité par d’autres peuples que les Africains, partis ailleurs. Autant j’encourage l’immigration interafricaine, autant je ne suis pas pour l’immigration vers l’Europe. L’Afrique, malgré son milliard d’habitants, n’est pas assez peuplée.

En même temps, vous ne pouvez pas nier la réalité qui est que bien des jeunes chez nous veulent partir…

L’Occident fait une bonne communication en vantant ses mérites, ce que l’Afrique ne fait pas. Les dirigeants africains ne vantent pas nos atouts. Vous savez, quelqu’un qui gagne 100000 francs Cfa ici vit mieux que quelqu’un qui gagne 1 000 000 de francs Cfa en France. Pourquoi on ne le dit pas ? Les Africains viennent souffrir en France. Moi, j’ai la possibilité de faire venir toute ma famille en France, je ne l’ai jamais fait. Je vais vous dire, l’immigration dont on parle est un épiphénomène. Très peu d’Africains vont en Occident. Ce sont les médias occidentaux qui amplifient ça avec tous les moyens dont ils disposent. Et ils font croire que tous les jeunes Africains veulent venir en Europe. Ce n’est pas vrai, c’est faux. C’est pour ça que je ne m’intéresse pas à ces affaires de sans papiers et d’immigration en Europe. Ce qui m’intéresse, c’est l’immigration interafricaine, que le Camerounais puisse s’installer en paix au Burkina, que le Zimbabwéen puisse s’installer en paix en Egypte. C’est ça notre futur. Dans vingt ans, nous aurons les Etats Unis d’Afrique, avec un seul président.

Pour finir, qui était votre maman, décédée, il y a peu?

Ma maman était une femme extraordinaire, une femme eton qui a eu beaucoup d’enfants. Elle était considérée comme la maman de tous les enfants de Pk 5 ici à Douala. Quand j’ai organisé ses funérailles ici, il y avait les Bassa qui pleuraient de leur côté, les Bamiléké de leur côté, les Douala aussi, les Eton, etc. Malheureusement, elle est décédée en République centrafricaine en allant rendre visite à un de mes demi-frères centrafricains. Dans la précipitation, ils n’ont pas respecté ses dernières volontés. Elle voulait être enterrée chez elle au Cameroun. Elle n’était pas partie là-bas pour mourir, elle était partie leur rendre visite et a été victime d’une attaque cérébrale.

Ce côté forte tête, vous le lui devez ?

Non, je le dois à ma grand-mère, une femme et héritière eton, fille de chef. C’est elle qui m’a élevée et m’a transmis ce côté forte tête, comme vous dites. Elle m’a toujours appris à tout à affronter et c’est pour cela que je suis comme ça.


Source: Le Jour Quotidien


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