Antoine Logmo Nnyb a été conduit à sa dernière demeure le 15 mars dernier dans son village à Mandjap, par Ngambè, dans le département de la Sanaga Maritime. Ancien premier vice-président de l'assemblée nationale, celui qui assura la transition entre André Marie Mbida et Ahmadou Ahidjo en 1956 comme Premier ministre, est décédé le 12 février dernier.
Il était âgé de 97 ans. Ainsi prend fin la vie de ce " patriarche héroïque ", selon de nombreux témoignages, qui aura marqué une bonne partie de l'histoire du Cameroun.
Antoine Logmo Nnyb est né le 25 décembre 1911 à Mandjap. Unique fils du chef traditionnel de son village, la vie du jeune Antoine Logmo va basculer lors de la guerre 14-18 opposant les forces françaises aux forces allemandes. Ce conflit qui étend ses tentacules au Cameroun oblige les populations de Babimbi à quitter le village. Nnyb Pondi envisage de s'enfuir à Douala avec sa progéniture. Mais son voyage n'ira pas jusqu'à son terme parce que la pirogue dans laquelle ils embarquent chavire dans la Dibamba. Nnyb Pondi se noie et laisse son fils de trois ans avec sa mère, Christine Nnyb, qui, seule va assurer son éducation.
Une fois inscrit à l'école, le jeune Logmo, selon des témoignages, est plutôt un élève appliqué. En 1929, il obtient son certificat d'études primaires à l'école régionale d'Edéa. Ce diplôme lui ouvre une multitude de portes. Mais il choisit d'entrer à l'école supérieure de Yaoundé où il obtient son diplôme d'instituteur en 1932. Il est alors âgé de 21 ans.
Sa carrière d'enseignant va le conduire dans plusieurs coins du Cameroun (Batouri, Guider, Ngoulemakong, Edéa, Songmbenguè, etc.) où il va assurer l'éducation de nombreux Camerounais dont certains deviendront des personnalités bien connues (Charles Onana Awana, Joseph Oyee, Koloko Levi, etc.).
En 1948, Antoine Logmo revient à Yaoundé où il est désigné pour suivre un stage à l'école normale d'instituteurs. Une fois sorti de cette école, il est affecté à Ebolowa. C'est de là qu'il est, une fois encore, désigné pour suivre un stage de quatre mois à Saint-Cloud en France.
Sa carrière politique va être aussi riche que celle d'enseignant, de fonctionnaire. Dès 1946, pendant ses années d'enseignant, Antoine Logmo milite au sein de l'Amicale de la Sanaga Maritime, dont il est le deuxième secrétaire. C'est donc au sein de cette amicale qu'il fourbit ses armes politiques, puisqu'il a pour camarade un certain Ruben Um Nyobé, qui prendra, deux ans plus tard, la tête de l'Union des populations du Cameroun (Upc).
Visionnaire
En 1956, Antoine Logmo est élu député de la région de la Sanaga Maritime. Cette année là, le Cameroun est plongé dans un cycle de violence. Samuel Mpouma et Charles Dilangué, deux de ses compagnons, sont assassinés. Les listes conduites par André Marie Mbida remportent les élections et ce dernier est chargé de former son gouvernement, le tout premier du Cameroun. Antoine Logmo hérite du poste de secrétaire d'Etat à l'Intérieur. Ahmadou Ahidjo est ministre.
Mais ce gouvernement est de courte durée puisque André Marie Mbida et tout son gouvernement sont contraints à la démission en février 1958. Les membres du gouvernement et du parti d'André Marie Mbida se rallient à l'Union camerounaise d'Ahmadou Ahidjo, si on en croit un manuscrit laissé par le défunt. Antoine Logmo refuse. Il est désigné par le haut commissaire Ramadier pour assurer l'intérim d'André Marie Mbida au poste de Premier ministre, juste le temps de la transition avec Ahmadou Ahidjo. Antoine Logmo est absent du gouvernement D'Ahidjo et perd dans la foulée son poste de député de la Sanaga Maritime.
Quatorze ans plus tard, Antoine Logmo marque son retour à l'assemblée nationale sous les couleurs de l'Union nationale camerounaise, dont il est élu président de la section départementale de la Sanaga Maritime. Il reçoit plusieurs fois le président Ahmadou Ahidjo à Edéa et, plus tard, Paul Biya, le 30 avril 1982 lorsque, Premier ministre, celui-ci vient inaugurer le nouveau pont sur la Sanaga. Jusqu'en 1992, quand il décide de quitter la scène politique, Antoine Logmo Nnyb est vice-président de l'assemblée nationale.
A l'heure des hommages, Hans Nyetam Nyetam salue le " visionnaire pacifique ", dont l'exemple " nous parle ". Pour Marcelline Moukoko, ancienne députée, Antoine Logmo est une personnalité politique incontournable. Idem pour Marcel Yondo, qui confie avoir bénéficié de son encadrement du temps où il était ministre des Finances. Quant à Felix Sabal Lecco, Antoine Logmo était un homme de paix, un grand patriote. Des témoignages qui sonnent comme un chorus avec ceux du fils du défunt, Antoine Logmo, qui loue son père, ce héros.
Source: Le Jour Quotidien
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