Hilaire Deho, Président de la CCGU e.V.
Bonjour Hilaire, vous êtes le Président de la Cameroon Cultural Union Goettingen
e. V. (CCUG e.V.), Association des Camerounais de Goettingen, pouvez-vous nous présenter
cette structure et les principaux acteurs qui la dirigent ?
Notre association est essentiellement constituée d'étudiants, de chercheurs
et de travailleurs originaires du Cameroun, vivant dans la ville de Goettingen et
ses environs, mais ouverte à tous (époux de Camerounais et tout autre citoyen intéressé
du Globe – sans distinction de race ni de religion). D’ailleurs, cette année, il
y a des gabonais et des allemands d’origine qui se sentent à l’aise parmi nous.
L’année passée nous avons joué au théâtre avec un citoyen allemand. Depuis quelques
années, les cinq continents sont représentés dans nos défilés de mode. L’équipe
dirigeante actuelle est constituée de Hilaire Deho (Président), Dorine Awah (Vice-présidente),
Rosy Abo’o (Secrétaire Générale), Nina Kenne (Trésorière), Josée Vouffo (Chargée
des Affaire Sociale et Féminine), Ferdinand Mouaffo (Chargée des Affaire Sportive
et Culturelle),
Göttingen est une ville qui n'a pas la dimension des Munich, Francfort ou Berlin.
Qu'est-ce qui vous a poussé à monter une association dans cette région et y avait-il
tant que cela matière en termes de démographie de Camerounais à cet endroit à créer
cette structure ? Et, selon vous, quels sont les problèmes majeurs et récurrents
que rencontrent généralement les Camerounais en Allemagne ?
Je voudrais tout d’abord attirer votre attention sur le fait que l’importance
aussi bien démographique que superficielle n’est pas une condition pour la mise
en place d’une association comme la nôtre.
La principale motivation des Camerounais d’origine qui ont, le 20 novembre 1991,
mis notre association sur pieds était le désir de regroupement et de renforcement
des relations entre Camerounais afin de mieux promouvoir la culture camerounaise
et d’être plus fort dans la résolution des problèmes qu’ils rencontraient. ´
Depuis la création de cette structure, quelles ont été vos grandes réalisations associatives
et pensez-vous avoir insufflé une quelconque dynamique au sein de la communauté
Camerounaise à Göttingen ?
Nous avons progressivement contribué à l’amélioration des conditions de vie des étudiants étrangers en général et camerounais en particulier de la ville de
Goettingen, en engageant des pourparlers avec les dirigeants de la ville et de l’université
ainsi qu’à travers l’organisation de conférences et de tables rondes sur les thèmes
sensibles. Par ailleurs, notre traditionnelle semaine culturelle, la plus importante
activité culturelle d’associations de ressortissants d’origine étrangère de notre
ville, est une des plus importante attraction de la communauté camerounaise d’Allemagne.
Cette performance ne saurait être uniquement celle des bureaux exécutifs qui se
sont succédés à la tête de l’association, mais bien plus celle de tous les membres
de notre association. Ceci dit, vous comprenez que sans l’existence d’une dynamique
au sein de notre communauté, il serait difficile de faire des réalisations de cette
ampleur. Je voudrais dire mes félicitations à tous ceux qui contribuent au maintien
et au développement de cette dynamique et inviter tous ceux qui hésitent encore
à nous rejoindre.
Quelques membres de la CCGU e.V qui défilent
On reproche souvent aux associations Camerounaises d'être des regroupements
tribaux ou bien des coquilles vides qui passent leur temps à n'organiser que des
soirées plusieurs fois par an. Qu'en pensez-vous concrètement et comment se positionne
la CCUG e.V. au regard de ces allégations ?
Nous regrettons la réalité de « regroupements tribaux » qui s’expliquerait
par le fait que les Camerounais sortent de leurs familles très jeunes pour étudier
en Europe et tombent dans le piège des « politiciens du ventre » pour reprendre
une expression connue. A Göttingen, nous sommes convaincus que le tribalisme n’existe
pas. Car le tribalisme serait une doctrine qui exigerait la loyauté des individus
à leur clan (ou tribu). Nous vous rassurons que le tribalisme n’existe pas du tout
ici. Nous sommes fiers que les compatriotes de Göttingen l’aient compris et c’est
ce qui fait notre succès.
Par rapport aux reproches d’association « de fêtards », je dois avouer que j’ai
très souvent entendu cela, mais il faut savoir que les étudiants, et même d’ailleurs
tous ceux qui travaillent, ont parfois besoin de récréation. Se regrouper autour
d’un projet annuel est déjà une bonne chose. Je ne pense pas néanmoins qu’une association
de Camerounais puisse limiter ses activités à une fête annuelle. A Göttingen, nous
organisons de temps à autres entre nous des débats soutenus, nous nous retrouvons
tous les dimanches pour jouer au foot, nos filles/femmes jouent au handball les
vendredi soir. Nous avons au moins cinq sorties sportives par an et sur demande
plusieurs sorties culturelles. Nous sommes convaincus que ces récréations sont la
fondation sur laquelle nous bâtissons nos performances académiques admirées. En
dernier ressort, si quelqu’un pense qu’une association est celle des fêtards, nous
lui conseillons d’aller la changer de l’intérieur. Vous convenez avec moi qu’à Göttingen,
on ne fête pas seulement, un coup d’œil sur le programme de la semaine culturelle
s'est déroulé du 14 au 19 Avril dernier vous convaincra certainement.
Qu'est ce qui explique selon vous le dynamisme et le sérieux de la communauté
Camerounaise d'Allemagne et pourquoi émigre-t-on toujours autant dans ce pays (délaissant d'autres
pays historiques comme la France) alors que les barrières linguistiques y sont très
fortes ?
J’avoue que n’ayant connu que l’Allemagne et le Cameroun, je puis difficilement
faire une comparaison objective. L’Allemagne est connu pour son sens de l’ordre
et du travail bien fait, je crois que cela est « contagieux ». Puis, quand vous
arrivez dans une ville comme Göttingen où l’on ne vous parle que positivement des
brillants étudiants Camerounais sur les 20 – 25 dernières années, vous n’avez pas
d’autre alternative que d’être dynamique. Un autre facteur est sûrement que auto-financer
ses études (ou du moins y contribuer) est captivant et il reste vraiment peu de
temps pour la distraction.
Je pense que les Camerounais vont massivement dans les pays qu’ils connaissent et
où on leur permet de continuer leurs études. C’est fortuitement le cas de l’Allemagne,
voilà tout!
Votre opinion de citoyen sur les drames récents qui ont touché le Cameroun, les émeutes
de Février avec son lot de pertes en vies humaines et la mort de 11 étudiants à
Conakry décédés le mois dernier ?
Nous sommes grandement désolés par ce qui s’est passé au Cameroun en Février dernier.
Chaque vie humaine perdue est inacceptable. Le gouvernement de la république devrait
tout faire pour que plus jamais les forces de l’ordre n’orchestrent des exactions
qui entraîneraient des pertes en vies humaines dans un pays sous-peuplé et menacé
par le SIDA. Les gouvernants doivent écouter les populations et le dialogue doit
toujours être privilégié. On ne gagne pas contre son propre peuple!
Ce qui s’est passé à Conakry nous a également attristé. Nous avons d’ailleurs adressé
nos condoléances aux familles éprouvées et à la communauté sœur de Conakry. S’il
est vrai que les compatriotes sont allés à Conakry en partie faire des filières
auxquelles ils n’auraient pas accès au Cameroun, il reste qu’ils sont nos vrais
ambassadeurs, ceux qui contribuent effectivement à la symbiose des peuples africains
comme prévue dans la charte de la Conférence d’Accra de 1958. Vous comprenez que ces échanges d’étudiants devraient être organisés/encouragés par les gouvernements
et/ou l’Union Africaine. Vu sous cet angle, nos ambassadeurs sont tombés en mission.
C’est un accident ordinaire mais très douloureux. Si les nations africaines refusent
de construire l’Afrique (ou les Etats-Unis d’Afrique), les familles le feront. C’est
par le même processus que nous nous sommes retrouvés à Göttingen. Nous participons
à l’avènement d’un monde meilleur, d’un monde plus uni et notre association est
notre maillon à l’élaboration de ce précieux édifice.
Quels sont les grands événements prévus par la CCUG pour l'année 2008 et comment
voyez-vous cette association dans les 5 prochaines années ?
Nous avons débuté l´année 2008 par la célébration de la fête de la jeunesse pendant
laquelle nous avons organisé un match de football et un match de handball. Ensuite,
nous avons invité un avocat allemand qui à fait un exposé sur les droit de l´étranger
en Allemagne pour permettre à nos jeunes frères qui venaient de s´installer en Allemagne
d´avoir une idée sur le comment vivre. En Mars, nous avons organisé un exposé pour
la journée de la femme et le thème était « femme entre étude, travail et projets
familiaux ». Et ce mois ci, nous avons organisé notre traditionnelle semaine culturelle
du 14 au 19 Avril pendant laquelle nous avons exposé des objets d´art camerounais toute la semaine à l´Université, où nous avons
aussi organisé un débat avec pour
thème « pourquoi l´Afrique est sous-développée ». Trois experts se sont succédé
pour traiter des aspects économique, politique et social du sous-développement de
notre continent. Le jeudi 17 Avril, a eu lieu le deuxième exposé sur les voies et
moyens pour sortir l´Afrique du sous-développement.
Le vendredi 18 Avril, nous avons organisé notre grande soirée culturelle avec la
participation de notre Chorale, la présentation de la version théâtrale de la mort
de Chaka Zoulou en allemand suivi d´un défilé de mode en tenue africaine et des
danses traditionnelles camerounaises. A partir du samedi 19 Avril, ont eu lieu les
activités sportives avec la participations de plusieurs équipes de football et de
handball venant de différentes villes d´Allemagne suivie de la grande soirée de
gala qui a clôturé la semaine culturelle. Et pour cette année, notre plan d´action
est loin d´être achevé car nous organiserons dans les prochains mois des cours de
préparation à l'examen de langue allemande, la célébration de la fête de l'unité
nationale et bien autres projets encore sont en gestation. Pour ce qui est des 5
prochaines années, notre association continuera à œuvrer pour défendre l'image du
Cameroun. Je remercie la rédaction de bonaberi.com pour cet interview et je vous
exhorte à continuer à aller de l'avant.
|