Il faut attendre quelques instants après pour que la femme reprenne son souffle pour donner des détails au commissaire, ce lundi 24 mars 2008. " Je sortais de mon domicile à Bali. J’ai rencontré un jeune homme qui m’a montré un papier sur lequel figurait le nom d’une femme qui lui aurait pris de la marchandise au Ghana et payé la moitié. Je lui ai di que je ne la connaissais pas. Il m’a montré des photos des ordinateurs portables, des téléphones, des casques pour salons de coiffure qu’il voulait vendre", explique t-elle.
Cheveux défaits, visage bouffi et les bras portant des blessures, Elise Ngollè écrase une larme avant de poursuivre : " nous avons loué un taxi qui était son complice pour aller voir la marchandise. Comme j’avais la recette de la semaine dernière, je me suis dit que je pouvais faire une affaire. Le taxi nous a conduit à Village où ils m’ont agressée, violentée et arrachée mon téléphone et le million 200.000 francs Cfa que j’avais ".
L’histoire d’Elise Ngollé n’est pas la seule du genre que l’on enregistre dans les commissariats de la ville de Douala. L’enquêteur en charge de l’affaire révèle " qu’il y’a au moins cinq plaintes de ce genre par jour ".
Au commissariat du 9ème arrondissement, on évalue au tiers le nombre de plaintes enregistrées par jour pour ce type d’escroquerie qui finit par des violences. Le phénomène a pris de l’ampleur. Que ce soit dans la rue ou dans les taxis, les citoyens ne sont pas à l’abri.
" Dragon noir "
Marguerite Guefack, qui en a été victime dans le taxi, relate " que les deux hommes bien habillés que j’avais trouvés à l’arrière du taxi m’ont proposé une affaire de 20 millions de francs Cfa. Il fallait d’abord cotiser ce qu’on avait dans les poches où même aller chercher à la banque et amener pour purification au guérisseur. Je ne sais pas ce qu’ils m’ont fait mais j’ai pris mes économies ". Elle préfère ne pas dire le montant car jusqu’aujourd’hui toute la famille en souffre. Mais elle se rappelle " qu’après la séance d’exorcisme sur l’argent ils m’ont envoyé chercher deux cailloux blancs et quand je suis revenue il n’y avait plus personne". Ces multiples agressions avaient considérablement diminué avec l’opération "Dragon noir" que la police avait lancée il y a quelque temps à Douala, qui consistait à mettre les hommes en tenue dans les taxis pour démasquer ces bandits. Son interruption a amené ces nouveaux escrocs à développer d’autres techniques de vol.
"Maintenant, c’est dans la rue. Devant les immeubles, les banques et les écoles onéreuses ciblant des parents aisés. Ils donnent parfois plusieurs rendez-vous pour savoir si vous êtes en contact avec la police. Quand nous arrivons à mettre la main sur certains d’entre eux, les plaignants ne veulent pas poursuivre les mis en cause. Ce qui fait que certains sont relâchés", explique l’enquêteur chargé de l’affaire Elise Ngollé.
Devant, la difficulté de retrouver ces voleurs d’un nouveau genre, la prudence est préconisée. "La solution extrême serait de ne pas parler aux inconnus, mais il faut relever que le mental des Camerounais est très fébrile face à des opportunités d’améliorer leur niveau de vie. Devant les propositions mirobolantes des gens qui ne vous regardent jamais dans les yeux, il faut prendre du recul et garder un esprit critique. Car après tout, on ne traite pas des affaires de millions avec le premier rencontré dans un taxi ou dans la rue", conseille le psychologue clinicien Dr Kouoh Dipanda.
Source: Quotidien Mutations
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