Encore un détournement d'argent au Cameroun
C’est à leur arrivée à l’hôtel Hilton de Yaoundé hier, 3
décembre 2008, où était initialement prévue la conférence de presse de
l’Association citoyenne de défense des intérêts collectifs (Acdic), que les
journalistes apprendront que ladite rencontre a été interdite par le sous-préfet
Locko Motassi Martin. Raisons invoquées : non respect de la lettre de la loi
n°90/55 du 19 décembre 1990 portant régime des réunions et des manifestations
publiques.
En clair, il est reproché à l’Addic de n’avoir pas indiqué dans sa déclaration
de conférence de presse les adresses et les identités des membres de cette
association. Un argument qui ne tient pas la route, de l’avis du secrétaire
permanent de l’Acdic, Jacob Kotcho qui déclare avoir fourni toutes ces
informations au sous-préfet. “ Le papier en-tête de l’Acdic utilisé pour
cette déclaration a d’ailleurs les adresses de tous les responsables de notre
association ”, précise-t-il. Le sous-préfet de Yaoundé III a également
interdit la tenue du dîner que l’Acdic avait prévu hier, à l’hôtel des députés.
L’administrateur civil principal estime que les résultats de cette étude doivent
être en priorité et avant toute démarche, “ adressés à M. le Vice-premier
ministre, ministre de l’Agriculture et du développement rural dont les agents
semblent incriminés ”.
Interdit donc de réunion au Hilton, Bernard Njonga s’est d’abord réfugié avec
les journalistes au siège de l’Acdic pour un échange en plein air. Ce que dame
pluie n’a pas permis à son tour. Et c’est finalement au Lions Club de Yaoundé,
sis à Rue Ceper, à un jet de pierre du siège de l’association, que le président
de l’Acdic trouvera cadre propice à ses révélations sur les malheurs de
l’agriculture camerounaise. Les journalistes auront ainsi droit à la projection
d’un documentaire sur les détournements, la corruption, le clientélisme, la
navigation à vue, etc. qui ont cours au Minader, provoquant ainsi la crise du
maïs qui se vit actuellement au Cameroun, où le kilogramme de cette denrée est
passé de 90 Fcfa les années précédentes à 185 Fcfa cette année 2008.
Pourtant, note l’Acdic avec des témoignages à l’appui, d’importantes subventions
ont été débloquées depuis 2006 dans le cadre du Programme national d’appui à la
filière maïs qui a enregistré un détournement de fonds d’un montant total de 1,2
milliards de Fcfa. Ceci à travers plusieurs méthodes déployées par les cadres du
Minader, avec en premier des Groupements d’initiative commune fictifs, de
l’argent débloqué mais jamais parvenu aux agriculteurs, ou alors arrivé avec des
sommes en moins, etc. Ce n’est pas tout. Selon l’enquête de l’Acdic, des 60
tracteurs indiens offerts au gouvernement camerounais en 2006 pour dynamiser son
agriculture, 5 seulement sont finalement parvenus à leurs vrais bénéficiaires,
les agriculteurs, le reste ayant été détourné par des ministres et assimilés,
des hauts cadres de l’administration, et même des députés !
Le documentaire réalisé par l’Acdic montre des tracteurs cachés dans les
résidences de ministres, au village depuis 2 ans, inutilisés. Alors que de
nombreux agriculteurs en ont besoin pour moderniser leurs méthodes de travail,
afin d’accroître leur productivité et faire face à la crise du maïs qui
s’annonce plus rude encore, si rien n’est fait. L’Acdic avait prévu une marche
devant les locaux du Minader pour dire non à ces détournements. Cette
manifestation a été interdite. Mais Bernard Njonga entend l’organiser, même
ailleurs.
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