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Dokta Thaddé ", dans son cursus scolaire, n`est pas allé plus loin que le cours moyen première année. Cela ne l`a pas empêché de devenir un vendeur respecté et prospère de médicaments à Yaoundé. Bien qu`il ne sache pas déchiffrer, ni interpréter et comprendre la notice des produits qu`il vend, trop compliqué pour son niveau, il porte et revendique fièrement son titre de " dokta ". Il n`est pas le seul dans cette situation. On peut en effet compter au bout des doigts ceux des vendeurs de médicaments, en plein air comme lui, qui aient suivi une formation minimale d`auxiliaire de pharmacie ou en soins infirmiers. Tels des dangers publics, ils vendent au quotidien la mort aux citoyens. Car acheter ses médicaments dans la rue, entre des mains inexpertes, c`est comme acheter sa mort. Ce marché de la rue prospère au Cameroun comme dans toute l`Afrique noire au vu et au su de tout le monde. Par exemple, derrière le grand mur d`enceinte de Texaco Nlongkak au carrefour Bata à Yaoundé, c`est là qu`est installé la pharmacie de rue de ce quartier. A l`instar de celles déjà existantes au marché central et au marché Mokolo à Yaoundé, au marché central et C à Bafoussam etc. Ces différents lieux ont en commun d`être le siège des grandes " pharmacies à ciel ouvert ". Dans ces lieux, sur des tables et étagères de fortune, et rarement dans des échoppes, sont superposés des flacons et cartons de diverses couleurs. Des médicaments de toutes sortes. Dans des conditions précaires. Les produits sont pour l`essentiel exposés aux intempéries. Situation qui ne semble guère gêner ces vendeurs. Samuel qui exerce ce métier de vendeur de médicaments depuis bientôt 5 ans à Bata Nlongkak souligne : " Nous ne pouvons rien contre le soleil, la pluie et la poussière. Nous sommes installées aux abords du trottoir où passent à tout moment des véhicules laissant derrières eux poussières et fumée ". Wamba, un autre vendeur tente de rassurer sur le conditionnement des médicaments. A l`en croire, tous les vendeurs protègent d`une manière ou d`une autre leur marchandise contre les intempéries. " Les médicaments les plus importants sont gardés dans les magasins dans des cantines et ne sortent que pour être délivrés aux clients ", indique t-il. Autre lieu, même décor. Au marché d`Ekounou, la pharmacie en plein air se développe et gagne du terrain depuis quelques mois, juste derrière le mur d`enceinte du commissariat du 14ème arrondissement. " Ancien vient voir. Ma chérie tu cherches quoi ? Monsieur tu veux quoi ?Tout ce que tu cherches tu le trouveras ici ". C`est par ces appels que les vendeurs et vendeuses de médicaments hèlent avec insistances et proposent toutes sortes de produits pharmaceutiques à leurs nombreux clients. Certains d`entre eux présentent leurs ordonnances pour acheter les médicaments qui leur ont été prescrits dans un centre de santé. D`autres se fient aux prescriptions à haut risque de ces vendeurs aux connaissances douteuses. Le conditionnement des médicaments vendus ne semble pas être un problème pour les clients qui viennent s`approvisionner ici. La modicité de leurs moyens financiers fait en sorte qu`ils croient n`avoir pour tout recours que cette pharmacie de rue. En effet, à la question de savoir pourquoi ils portent leur choix sur ces produits de rue au lieu d`aller en pharmacie où ils sont sûrs d`avoir de bons produits, et où l`on trouve également des génériques à bon prix, on se surprend d`entendre que les médicaments de rue coûtent moins chers. " Les médicaments coûtent cinq fois moins cher ici qu`à la pharmacie ordinaire ", explique une cliente venue acheter des Bactrim, un antibiotique, semble t-il, très efficace contre la toux. " Le Bactrim ne coûte que 250 Francs Cfa la plaquette de 10 comprimés. Dans aucune pharmacie de Yaoundé vous ne trouverez un médicament à ce prix là. Par ces temps de difficultés financières, nous sommes obligés de venir ici ". Dans le même sens, une autre cliente ajoute : " Pour une ordonnance de 20000 francs à la pharmacie, on peut débourser moins de 10000 francs pour s`approvisionner ici ". Dégradation des principes actifs Que dire des conditions de conservation ? S`il est vrai que chaque médicament a ses caractéristiques propres ; et qu`il les conserve jusqu`à la date de péremption à condition qu`il soit conservé dans des conditions qui lui assurent sa stabilité, s`il est aussi vrai que ces conditions sont toujours respectées en pharmacie et à l`hôpital, rien ne prouve qu`il l`est dans la rue, et dans les marchés. " Une étude réalisée dans une ville nigériane sur la qualité des gélules de tétracycline (un antibiotique très utilisé), montre qu`entre le fabricant et les étalages la biodisponibilité passe de 100 à 81% tandis que le contenu connaît une chute à 61% ", explique Mlle Timnou Aimée, étudiante de 6ème année de médecine en stage au Chu de Yaoundé. Ce qui démontre clairement à quel point on ne peut se fier à l`efficacité des médicaments vendus dans la rue. Et de poursuivre : " Dans la rue, les médicaments se dégradent rapidement sous l`action combinée de la chaleur, de l`humidité et de la lumière du soleil. Ainsi, bien que la date de péremption soit la même, les médicaments de la rue perdent leurs effets avant la date prévue. Ils se transforment en substances toxiques très dangereuses voire mortelles pour le consommateur ". Selon le Dr David Singhe, pharmacien expert analyste, " la stabilité du médicament est l`un des facteurs qui garantissent son efficacité et donc son utilisation judicieuse en thérapeutique ". Cette stabilité passe par les conditions de stockage qui jouent un rôle primordial dans la conservation des médicaments de même que leur formulation. Formel, il indique que " les médicaments de la rue ne sont et ne peuvent pas être de bons médicaments ". Ils sont dangereux à cause de l`altération des molécules due aux mauvaises conditions de stockage, de distribution et de transport. Ainsi, du fait de la mauvaise qualité de ces médicaments, l`on comprend, sans toutefois être un génie, que le malade qui achète son médicament dans la rue s`expose à de multiples risques pour sa santé. Ces risques sont le plus souvent liés aux sous-dosages ou sur-dosages, et à la dégradation des principes actifs contenus dans ces produits. " Au lieu de soigner, ces médicaments de rue qui sont pris abusivement et sans aucun contrôle empoisonnent l`organisme, renforçant ainsi la résistance des microbes qui s`adaptent aux anti-microbiens. Cette résistance aux anti-microbiens est la conséquence naturelle de l`usage des médicaments d`origine douteuse qui tuent les micro-organismes sensibles et laissent les souches résistantes survivre et se multiplier ", explique pour sa part M. Charles Mboning, directeur de l`école de formation des délégués médicaux de Melen à Yaoundé. " Si l`on veut trouver une solution à ce problème, les autorités doivent passer du stade de l`information à celui d`une véritable communication sur la question ", indique t-il. L`usage des médicaments de rue n`apporte rien aux malades mais, au contraire, semble accroître la résistance des germes pathogènes aux traitements futurs. Ses conséquences sur la santé des populations sont donc indénombrables voire catastrophiques : résistances aux antibiotiques et aux antipaludiques, intoxications, destruction des organes sensibles : foie, cœur et reins. En fin de compte, au lieu d`être moins chers comme le clament ses adeptes, les médicaments achetés dans la rue sont bien plus chers parce que pouvant être très dangereux pour la santé. | |
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Source: Repères-CM.com | |
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