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Patrick Mvondo Essiga : « ce régime n’est pas de la volonté du peuple »
(12/02/2010)
Patrick Mvondo Essiga, le secrétaire général de l’Association de défense des droits des étudiants du Cameroun (Addec), porte son regard sur le discours à la jeunesse du président Paul Biya.
Par Redaction Bonaberi.com (Anne Mireille Nzouankeu)
Patrick Mvondo Essiga, secrétaire général de l'Addec
Patrick Mvondo Essiga, secrétaire général de l'Addec
Quel commentaire faites-vous à la suite du discours à la jeunesse du 10 février dernier ?
Je vais commencer par parler du thème choisi pour cette fête à savoir la consolidation du cinquantenaire de l’indépendance. C’est l’occasion pour moi de dénoncer vivement l’imposture qui est institutionnalisée à travers l’organisation d’activités marquant cette indépendance. Je parle d’imposture parce que pour moi, il serait grand temps qu’il soit véritablement enclenché un processus de vérité, de justice et de réconciliation avec l’histoire de notre pays.

On ne peut pas aller sur des bases malsaines pour dire qu’on va construire un pays. Il se trouve qu’il a été prouvé et vérifié que le régime actuel appartient à la lignée dite aujoulatiste, c’est-à-dire des membres qui ont combattu et qui ont farouchement résisté à une indépendance de notre pays. De ce fait, ils ont massacré des nationalistes au passage. Il faudrait déjà que cette partie de l’histoire soit exhumée et enseignée à tous parce qu’il ya des frustrations qui sont pour l’instant contenues, du fait justement qu’on veut porter à l’amnésie cette partie de l’histoire du Cameroun. C’est primordial de le faire si on veut pour commémorer le cinquantenaire sur des bases saines.

Pour revenir au discours du chef de l’Etat, j’ai retenu deux points essentiels : l’annonce faite de construire un centre de formation de football et celle qui précise que les camerounais doivent se rappeler qu’ils ne sont pas dans un Etat désorganisé et qu’à la tête de cet Etat, il y a M. Biya qui en est le chef. Je trouve assez amusant qu’à l’attention de la jeunesse, on rappelle ce genre de données. Je trouve aussi amusant qu’on oubli de marquer ne serait ce qu’un moment de commémoration pour ces milliers de jeunes qui ont été massacrés pendant le mois de février 2008 et également pour ces étudiants qui ont été massacrés dans les universités en 2005 et en 2006.

Pour ces différents massacres, des commissions d’enquête ont été mises sur pied pour dégager les responsabilités et punir ceux qui ont commis ces actes macabres. Malheureusement, aucune allusion n’a été faite à ces évènements, preuve que dans ce pays on est toujours prêt à vouloir bâtir la société sur les cadavres des concitoyens. On ne peut évoluer si on ne réalise pas ce travail de commémoration.
Pour ce qui est de la construction d’un centre de formation, cette primauté qui est toujours accordée au football commence déjà à exaspérer. La jeunesse n’est pas que le ludique. Il y a bien d’autres aspects de la vie qui peuvent être les soucis majeurs de la jeunesse notamment le volet de l’emploi.

Que pensez-vous de la manière dont est célébrée la fête de la jeunesse ?
Nous sommes aujourd’hui à la 44ème édition. Je crois qu’au moment où cette idée de célébrer l’existence de la jeunesse était lancée, il s’agissait beaucoup plus de réfléchir sur les problèmes qui minent la jeunesse et d’apporter des solutions. Malheureusement, au fil des ans et la médiocrité de ce régime aidant, on a plutôt transformé cette célébration en occasion festive, jouissive, ludique, récréative, distractive et oisive.

Et ce n’est pas une exclusivité de la fête de la jeunesse, mais pour toutes les festivités marquant l’existence d’une tranche particulière de la population. Que ce soit pour les jeunes, les femmes ou les travailleurs, c’est beaucoup plus pour l’Etat l’occasion de faire la propagande de ses actions. On dévoie le sens premier qui était accordé à ces célébrations et c’est dommage pour un Etat qui se dit moderne et qui veut s’arrimer aux normes mondiales de développement.



Vous avez tout à l’heure parlé d’une commission vérité, justice et réconciliation. Quelle est cette vérité et à qui doit-on rendre justice ?
La vérité est qu’ayant adopté le mode démocratique comme manière de gouverner notre pays, il ya lieu de reconnaitre que ce régime n’est pas l’émanation de la volonté du peuple. Lorsque le chef de l’Etat s’attardait sur sa place au sommet de l’Etat, il aurait dû faire allusion au fait que s’il est à la tête de cet Etat, c’est de façon illégitime.

Comment parler d’illégitimité lorsqu’il y a eu des résultats de vote ?
Si on s’en tient à la dernière élection présidentielle, il y a eu un taux d’abstention de 80% ce qui veut dire 20% des camerounais ont voté. Or, 13% ont voté le Rdpc et 7% ont voté pour les partis d’opposition. On ne peut pas de façon consciente dire qu’on est le chef d’un Etat avec 20% de participation. C’est sur cet aspect que je fais allusion à la vérité.

L’autre aspect est qu’il faudrait que cette période l’histoire de notre pays pendant laquelle les français gouvernaient soit enseignée à tous les niveaux de notre système éducatif. Malheureusement, aucun passage de la vie de l’Upc n’est mentionné dans les manuels scolaires. Et même lorsque c’est fait, c’est plutôt pour les discréditer. Compte tenu de l’importance du rôle de l’Upc dans le processus d’accès à l’indépendance, il y a lieu pour moi de préciser ici que cet aspect doit être mentionné dans les manuels d’histoire.

Qu’est ce que ça va apporter à une jeunesse qui a par exemple soif d’emploi?
Je parle en rapport avec le thème de cette édition de la fête de la jeunesse. On ne peut pas demander aux jeunes de consolider les 50 ans de l’indépendance alors qu’il y a des aspects importants de cette indépendance qui ne sont pas divulgués. Ils sauront qui sont ceux qui ont réellement œuvré à l’avènement de l’Etat, fut-il nominalement indépendant.

Il y a des actions qui ont été portées à l’amnésie c’est pourquoi je parle de vérité. Cette vérité doit être exhumée et je ne parle pas juste de la période de l’indépendance mais aussi des massacres des étudiants en 1991, les massacres lors des villes mortes, les massacres du marché Congo et bien d’autres choses. Puisque les coupables sont encore vivants, la justice consisterait à les sanctionner et il reviendra aux familles des victimes de savoir si elles peuvent pardonner ou pas, d’où la réconciliation. Un peu comme au Rwanda ou en Afrique du Sud. Cette démarche a pour but de valoriser la liberté car c’est au nom de la liberté sous toutes ses formes, que les gens ont été massacrés

C’est aujourd’hui le 20ème anniversaire de la libération de Nelson Mandela, qu’est ce que ça vous fait ?
Il y a un aspect sur lequel j’aime toujours revenir dans tous mes champs d’intervention. J’aime faire allusion à la liberté ? Je crois que dans ce sens, Nelson Mandela comme tant d’autres personnes incarne vraiment cette notion de liberté.

Lorsqu’on revient au moment le plus fort de son militantisme, la liberté était la notion guide de cet engagement et derrière cette notion, il y a des aptitudes qui ont également été valorisées : le sacrifice, la résistance, la tolérance, le partage l’abnégation la détermination le courage. Ce sont des aptitudes dont chacun doit être imprégné si on veut instaurer un régime des libertés. C’est en cela que Nelson Mandela est une figure emblématique.



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