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Lettre ouverte de Paul Eric Kingué aux leaders politiques et de la société civile
(02/03/2011)
Dans une lettre ouverte envoyée aux médias, Paul Eric Kingué, ancien maire de Njombé Penja, lance un appel aux leaders politiques Camerounais.
Par Paul Eric Kingué
Paul Eric Kinguè, maire de Njombé Penja
Paul Eric Kinguè, maire de Njombé Penja
Monsieur le Président et Homme politique,

Le 29 Février 2011, j’aurai passé trois (03) années, jour pour jour en détention dans les geôles de la République, sans preuves et charges caractérisées contre moi.

Trois années de détention arbitraire que je ne m’explique pas, au regard des infractions qui me sont injustement collées au dos, mais qu’aucune juridiction n’a jamais réussi à démontrer.

Trois années de condamnations répétées sans fondement juridique, mais aussi, trois années d’indifférence de votre parti politique, comme si ma seule appartenance au RDPC ne méritait pas que vous vous interrogiez sur ces affaires pour lesquelles j’ai longtemps criées et dénoncées les manipulations politiciennes.

Monsieur le Président et Homme politique, nos qualités d’hommes politiques ne font-elles pas de nous des hommes et des femmes obligés de nous interroger au quotidien sur nos environnements respectifs et sur les hommes qui les peuplent ? Sur leurs difficultés au jour le jour et sur leurs tribulations ? Sur leur misère et sur les abus dont ils sont ou peuvent être victimes de part et d’autre et parfois injustement ?

Pouvons-nous être des hommes politiques détachés des cris et pleurs de nos concitoyens d’où qu’ils viennent et où qu’ils se trouvent ?

Monsieur le Président et Homme politique, parce que convaincu que notre mission est avant tout, notre abnégation au profit des autres, et très souvent de ceux que nous ne connaissons pas forcement, je vous tends la main, afin que vous m’aidiez non pas à solliciter ma libération, mais à dénoncer les dysfonctionnements de nos institutions judiciaires qui ont manifestement refusé de s’affranchir des pressions politiques et économiques, œuvrant ainsi au quotidien, à tirer le Cameroun vers le bas, en s’éloignant de manière flagrante des lois et règlements pourtant mis à leurs dispositions pour réguler la société camerounaise que chacun de vous rêve de diriger demain.

Monsieur le Président et Homme politique, la justice camerounaise est malade, elle est déréglée et est presqu’au bord de l’étranglement, engluée dans une corruption comateuse qui n’a d’égale que les incongruités et les incohérences des jugements qu’elle rend. Les magistrats par ailleurs, dans leur grande majorité sont otages des politiciens qui les manipulent à dessein, tantôt dans le but d’abattre leurs adversaires, tantôt dans le but de leur permettre l’accès facile au pouvoir au cas où.

Cette catégorie de magistrats a tout oublié des lois, des conventions, des traités ratifiés par le Cameroun au point où je me demande s’il leur arrive de dormir, auprès leurs épouses et enfants tous les soirs, la conscience en paix.

Pour illustrer mes écrits, et pour ne prendre que deux cas (parce qu’il y en a des centaines dans nos prisons que je peux prouver) ;

1. a) Ma condamnation à 10 ans de prison ferme par le tribunal de grande instance du Moungo pour un prétendu détournement de la somme de 1.400.4000 (Un million quatre cent mille) Francs CFA

Dans le cadre de cette affaire, il m’a été reproché, selon le jugement rendu et dont je vous joins copie à cette correspondance, d’avoir perçu des mains de ma caissière, au moment où j’étais Maire, la somme de 1.400.4000 (Un million quatre cent mille) Francs CFA en trois tranches. Seulement, tout au long des débats, ma caissière, citée alors comme témoin à charge par le Ministère public, déclare ne m’avoir jamais reversé le moindre centime de la somme incriminée et ceci est consigné dans les notes d’audience du 18 Septembre 2008.

Plus tard, pour me condamner, le collège des juges confirme, sans dire d’où il tire cette information pourtant contraire à celle de ma caissière (témoin de l’accusation), qu’elle m’a reversé de l’argent. Ce qui est une dénaturation des faits de la cause et ouvre la voie à la nullité absolue de cette procédure. Le juge ne pouvant faire dire à un témoin, ce que celui-ci a refusé de dire.

b) En parcourant la décision rendue (copie jointe) et au 9ème rôle, 2ème paragraphe, le juge écrit noir sur blanc ce qui suit : « Attendu que ce crime repose sur le postulat qu’avant et après la cérémonie d’installation de l’Exécutif communal, le Maire KINGUE Paul Eric a perçu des mains de la caissière, la somme de 1.400.4000 (Un million quatre cent mille) Francs CFA qui n’a pas été affectée à l’organisation de la cérémonie, mais a été utilisée à des fins personnelles ».

Ici, et sans commentaire, ni interprétation, le juge dit clairement et sans équivoque, que le détournement qui m’est reproché repose non sur une preuve, mais sur un POSTULAT. Or, selon le dictionnaire "HACHETTE", le POSTULAT est défini comme "une proposition que l’on demande d’admettre comme vraie, sans démonstration". Nulle part au monde, même pas dans une République imaginaire, une décision de justice, ne peut reposer sur un postulat, surtout lorsqu’il s’agit d’une matière spéciale comme le crime. En matière criminelle, les condamnations doivent reposer sur des preuves, et les preuves elles-mêmes doivent être formelles, étanches, certaines, irréfutables. Car, il s’agit de supprimer à un citoyen, le droit à la liberté pour de longues années.

2. Au dernier paragraphe du verso du 9ème rôle (voir Expédition jointe) de la décision n° 19/Crim du 14 Janvier 2011, le juge écrit une fois de plus, noir sur blanc, ce qui suit : « Que s’il est vrai que les bons (pièces) par lui signés (par Kinguè) à cet effet n’ont pas été produits au cours des débats, il n’en demeure pas moins que le contrôle de la Trésorerie générale de Nkongsamba, en date du 11 Octobre 2007, fait bien état de l’existence de ces bons (pièces) que Kinguè Paul Eric ne saurait contester ». De la pure sorcellerie en somme.

Ici, le juge dit bien n’avoir vu produite aucune pièce signée par moi devant sa juridiction au cours des débats, mais fait allusion à un rapport de la Trésorerie générale de Nkongsamba, qui n’a lui-même jamais été versé, ni débattu au cours de ladite procédure. Même si par extraordinaire le rapport avait existé, il n’aurait jamais constitué une preuve en l’absence des bons ou pièces signés par moi ; car seuls ces bons auraient prouvé que j’ai perçu, obtenu ou retenu le moindre centime de Francs CFA de la Commune dont j’avais la charge.

En se limitant dans un premier temps sur ce procès qui, sans preuve c’est-à-dire sans pièces tel que le reconnaît le juge lui-même dans sa décision, n’y a-t-il pas lieu de se poser la question de savoir sur quel autre élément celui-ci a fondé sa décision ? En dehors des pièces dont il dit la non-production à l’audience, quel élément avait-il pour asseoir sa décision ? L’article 310 du Code de procédure pénale stipule pourtant ce qui suit : « Le juge ne peut fonder sa décision que sur les preuves administrées au cours des débats ». Cette disposition légale a le mérite d’être limpide et sans équivoque.

Monsieur le Président et Homme politique, n’est-il pas temps que vous vous intéressiez à ces cas de violations flagrantes des lois par les magistrats de notre pays ?

Devez-vous vous sentir éloignés des injustices que vous pouvez, chacun pris individuellement, subir aujourd’hui ou demain ? Je pense qu’il est de votre devoir d’agir, de soulever publiquement et vertement ces cas, que je mets fort opportunément à votre connaissance. Ne dit-on pas qu’une injustice commise quelque part est une menace pour la justice dans le monde entier ? (Martin Luther King).

Il est de la responsabilité des hommes politiques camerounais de tout bord, d’arrêter la décrépitude de notre système judiciaire, qui s’est désormais éloigné de ses propres symboles (balance équilibrée) et qui, ne s’est jamais aussi mal portée que ces dernières années et devant laquelle nous ne pouvons plus seulement nous résigner en spectateurs, réduits à regarder ces hommes et femmes pourtant encadrés dans leur formation par les sacrifices du contribuables camerounais (ben-skineurs, cadres, taximen, commerçants et autres).

Les lois font désormais peur à la majorité de nos magistrats et c’est ce qui explique leur recours permanent aux déductions, aux supputations, à la philosophie, à la métaphysique (comme celles contenues dans les dossiers me condamnant à 10 ans de prison et celles me condamnant à 06 an de prison pour les émeutes sans témoins à charge, ni pièce à conviction).


3. Pour ne pas me limiter à mon seul cas, je voudrais porter à votre connaissance jusqu’où, les ravages de la manipulation politicienne de notre justice poussent nos magistrats.

Le Cameroun a ratifié le Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique (OHADA) ; c’est à ce titre qu’une Société Anonyme peut désormais n’avoir qu’un seul actionnaire, fût-il l’Etat du Cameroun.

Les sociétés impliquées jusqu’ici dans le cadre de l’opération dite "Epervier", notamment le Port Autonome de Douala (PAD), le Chantier Naval et Industriel du Cameroun (CNIC), la Société Camerounaise des Dépôts Pétroliers (SCDP), La Société Immobilière du Cameroun (SIC), le Crédit Foncier du Cameroun (CFC), la Cameroon Airlines (CAMAIR), sont des sociétés Anonymes ; les actes de gestion posés dans ces entreprises, quand ils sont bien conformes, constituent des délits et non des crimes.

La loi n° 2003/008 du 10 Juillet 2003 portant "Répression des infractions contenues dans certains actes uniformes de l’OHADA" doivent être la "bible" des juges en charge du jugement des affaires concernant les dites entreprises. Il se trouve que jusqu’à nos jours, les jugements rendus s’appuient sur l’article 184 du Code pénal en violation du principe de droit qui érige la primauté des traités internationaux sur les lois nationales.

Ce principe a été rappelé par le Premier Président de la Cour Suprême en Février 2010, au cours de la rentrée solennelle de ladite Cour.

Au rang des violations des principes de loi, l’on pourrait aussi citer l’article 310 du Code de procédure pénale, dans le but de rester coller aux lois : "Le juge décide d’après la loi et son intime conviction ; sa décision ne doit être influencée, ni par la rumeur publique, ni par la connaissance personnelle qu’il aurait des faits, objet de la poursuite."

En tout état de cause, cette décision ne peut être fondée que sur les faits administrés au cours des débats (Article 310 du Code de procédure pénale).

Tout ceci, ne peut cependant participer que de la dynamique d’une justice indépendante et impartiale. Peut-on se risquer d’en dire autant sur les cas de l’opération dite "Epervier" ? Que NON !

- La loi n° 2006/015 du 29 Décembre 2006 portant "Organisation judiciaire" dispose en son article 24 : "Le juge d’instruction est un magistrat du siège ; toutefois, il ne peut participer au jugement des affaires dont il a eu à connaître à l’information judiciaire".

Cette disposition n’est pas respectée. Dans le cas du PAD par exemple, le même magistrat a commandé l’expertise judiciaire, même l’instruction et a participé au jugement.

Les textes issus du Traité de l’OHADA, pourtant librement et sans contrainte, ratifiés par le Cameroun, sont ostentatoirement piétinés, avec pour conséquence, les condamnations spectaculaires et sans frénésies de certains Directeurs généraux et de leurs collaborateurs à des peines inacceptables pour l’intelligence de la nation toute entière.

N’est-il pas de votre devoir, Hommes et Femmes politiques du Cameroun, de vous pencher sur ces cas que nul (s’il n’a été victime de ce système judiciaire en désuétude) ne peut porter à votre attention ?

Je reste convaincu que si vous vous impliquez dans ces cas préoccupants, vous aurez réussi à réconcilier le Cameroun avec lui-même ; car tel est aussi et surtout votre mission

Celle d’enrayer les frustrations diverses de nos compatriotes, dont on ne peut jamais à priori, parier sur les réactions le moment venu.
La PAIX du pays que vous voulez diriger passe par votre implication dans cette lutte, qui consiste à mettre sur la place publique, les dérives d’une justice dont le rôle est pourtant essentiel pour la consolidation politique, économique et sociale du Cameroun.

Je reste persuadé que si vous vous joignez à mes cris, une société plus juste sera édifiée dès aujourd’hui, pour votre bien personnel et sans doute, pour des millions d’autres camerounais écrasés par le zèle d’une magistrature politisée, ayant tourné le dos aux lois, règlements et traités divers, parce que otages des ambitions de quelques individus que l’on n’ose encore pas dénoncer, mais qui le seront à court terme.

Mon procès relatif aux émeutes de Février 2008, entre dans sa phase des réquisitions du ministère public et des plaidoiries le 03 Mars 2011 à 9 heures. Votre présence pour comprendre la véracité de mes écrits pourrait être utile.

La victime d’acharnement,
Paul Eric Kinguè
Maire élu de Njombè-Penja
Détenu à la prison centrale de New-Bell
Douala, le 28 Février 2011


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