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Cameroun : La faute du Cabinet Civil de la Présidence dans l’affaire de l’hebdomadaire congolais Le Choc
(04/11/2009)
L'hebdomadaire congolais Le Choc a relayé un article mettant le doigt sur un point sensible de la présidence camerounaise. Beaucoup d'encre a coulé depuis.
Par Oscar Gabriel Molla

Le microcosme politico-médiatique camerounais est ébranlé depuis peu par une sortie pour le moins inhabituelle du réputé discret, presque secret Cabinet civil de la présidence. Une onde qui s’est répercutée jusque dans les milieux autorisés de la diaspora. En effet prenant le prétexte d’un « droit de réponse », à la lisière d’un rappel à la déontologie, le très altier Directeur du Cabinet civil, Martin Belinga Eboutou, réputé proche du Président Biya, a adressé, le 26 octobre 2009, une mise au point improbable, ayant des allures de mise en garde à l'hebdomadaire congolais Le Choc qui a défrayé la chronique dans ses dernières livraisons par des articles controversés, non sans maladresse accusant publiquement le président camerounais de manipulation et forfaiture.

La saillie de Martin Belinga laisse perplexe et amplifie la confusion et les malentendus nés des “articles” du Choc. A l’observation rien de bien extraordinaire qu’un proche collaborateur du Chef de l’état prenne sa plume pour manifester sa désapprobation à un magazine qui s’attaque toute honte bue au président et dénoncer « la campagne abjecte de dénigrement » dont ce dernier serait victime.

Mais, il faut dire que dans le contexte du Cameroun cette démarche prend une toute autre signification et interpelle à plus d’un titre. Des deux choses, l’une : ou le Palais d’Etoudi considère que le très confidentiel périodique Le Choc, est le bras armé du clan Sassou, auquel cas cette hypothèse légitimerait l’idée selon laquelle il y a un réel combat de leadership en Afrique Centrale depuis la disparition d’Omar Bongo.

Ou alors, la Présidence camerounaise par le biais de son Cabinet Civil prend au sérieux les élucubrations de l'approximatif Le Choc, ce qui serait inquiétant à ce niveau de la hiérarchie républicaine. Dans l’un et l’autre cas, il y a manifestement erreur d’analyse et mauvaise gestion d’opportunité, accompagnées d’un manque cruel de maîtrise et de perspective dans l’approche d’un dossier si banal qu’un simple service du Ministère des Relations Extérieures ou du Ministère de la Communication aurait géré sans effort. A se demander à quoi sert l’Ambassade du Cameroun au Congo !

Exercer son droit de réponse est un acte normal en soit et universellement admis. Nul ne conteste cette évidence. Malheureusement, le Dcc semble avoir, par son coup de sang, somme toute conjoncturel, oublié l’antinomie qu’il y a entre droit de réponse et devoir de réserve. Rétrospectivement, le paradigme juridique évoqué pour justifier sa correspondance aurait pu s’effacer devant un autre plus intuitif, celui là, le bon sens. D’autant plus que, les textes polémiques incriminés sont marginaux et ne nécessitent pas de situer le débat à un niveau aussi élevé de la république. Ce qui nous fait penser qu’il s’agit ici d’un acte délibéré de communication politique intérieur. On est clairement dans le champ classique de la communication politique dans l’espace public endogène.

Hélas, dans son « droit de réponse », Martin Belinga se fourvoie et déconstruit les usages et par la même occasion ce qui a toujours fait la « force » du Cabinet Civil : sa discrétion, son mythe et sa distance mesurée. Ce ne serait pas caricatural de dire qu’à ce rythme, de la déconstruction, on risque de sombrer dans la dérive. De plus, quand on embouche les trompettes de la légende flatteuse de l’universalisme de la démocratie, pour prétendre que le Cameroun s’en est approprié, c’est au bas mot une tartufferie au pire une imposture. Pis, on frôle l’escroquerie quand on s’appuie sur des références chiffrées astucieusement détournées à son avantage.

A n’en pas douter, le Directeur du Cabinet civil convoque adroitement le réflexe identitaire et nationaliste pour créer l’empathie des Camerounais et leur adhésion à une cause dont les contours leur semblent singulièrement imprécis et lointains. La secondarité des tracas médiatiques du président est une évidence dans la situation du Cameroun aujourd’hui. L’érosion de la légitimité de Paul Biya est telle que tout cela indiffère les Camerounais « moyens». Dans le champ de la conscience collective, cette affaire est un non-événement. La scission entre la chose publique et l’individu Biya est telle que sa réputation jusque là circonscrite a désormais dépassé les frontières du Cameroun.

En revanche, nous partageons sans manichéisme aucun, le point de vue du Dcc qui dit entre les lignes qu’on gagnerait à materniser l’Afrique centrale pour rendre accessoires les frontières culturelles et politiques. Assurément, cela concourrait à l’émergence d’une réelle identité sinon commune, tout au moins partagée. De ce point de vue, le Dcc prend de la hauteur et sa correspondance aura au moins le mérite d’avoir une portée symbolique dans le contexte géopolitique sous-régional.

Quoi qu'on en dise, cela reste un alibi qui a enfanté d’un acte de communication politique. A priori, il suppose une connaissance « des codes et des canaux de l’espace public et une maîtrise de son langage ». Ce qui est manifestement loin d’être le cas du CC qui trahit son passéisme et révèle une certaine fébrilité doublée d’un manque de sang froid dommageable. D’autres formes de médiation et de modalités mieux adaptées existent pour éclairer l’opinion ou la prendre à témoin. Certes Paul Biya est aujourd’hui dans une situation qu’il déteste.

Il est exposé depuis la disparition d’Omar Bongo. Contraint de jouer les leaders de substitution en Afrique Centrale, à son corps défendant, il est devenu de fait la cible des commentateurs de tout bord, lui qui a l’art d’avancer masqué. Ceci explique sûrement pourquoi le Cabinet Civil s’approprie un dossier sans intérêt réel et sans véritable enjeu. Dans sa démonstration, le Dcc crie au complot pour tenter de limiter les dégâts collatéraux et l’effet de contagion en se faisant l’amplificateur de l’agacement institutionnel.

L’argumentation trop technique délibère de manière univoque et place la présidence camerounaise au cœur d’un débat accessoire. En tous les cas, l’intentionnalité brouille le message, car couvert de suspicion. Le médium utilisé fait perdre le sens au discours. On nage en plein marasme de l’intelligence ayant maladroitement capitulé face à un petit journal insignifiant.



Rappelons au Directeur du Cabinet civil, s'il en était besoin et par la même occasion à son adjoint Joseph Lé, journaliste réputé avisé, que certains magazines sont des machines à générer de l’interprétation. La transgression et la provocation constituent les piliers de leur modèle économique.

Par conséquent, qu’un modeste magazine dont le fond et la forme relèvent de la supercherie journalistique serve à son lectorat une tarte à la crème indigeste mélangeant la corruption endémique que tout le monde nous envie ( !) à un portrait au vitriol du président camerounais, à certains égards réalistes, n’est qu’un épiphénomène.

Si le Dcc de la présidence s'amuse à répondre à chaque fois qu'une publication, un site internet “s'attaquent” à Paul Biya, il n'est pas sorti de l'auberge. Nous pensons qu’il y a d’autres urgences et priorités au Cameroun. La hiérarchisation des enjeux devrait être l’impératif actuel et la prise en compte du fait moderne communicationnel, une nécessité.



De plus, en citant nommément : Jean Paul Tedga, Mila Assouté et bien d’autres encore, Martin Belinga leur déroule le tapis rouge et leur offre une légitimation et une notoriété inespérées! Politiquement, c’est incontestablement une faute. Stratégiquement c’est contre-productif, tactiquement aventureux pour le pouvoir camerounais en place et du pain béni pour les personnes concernées et leurs alliés.

Il faut dire que l’austère longiligne Dcc a longtemps fait illusion avec ses grands airs de diplomate « averti ». Aujourd’hui dans la confusion et la cacophonie qui caractérisent la communication gouvernementale il vient de révéler qu’il manque de sang-froid et d’expérience dans la communication politique en dehors des couloirs feutrés des palais et chancelleries.

De manière plus générale, cette péripétie vient dévoiler les incuries et les contradictions de la communication au sommet de l’état, peu habitué à cet exercice périlleux. Rien d’étonnant, d’autant plus qu’une bonne partie de celle-ci a été privatisée et externalisée depuis une dizaine d’années au bénéfice d’une certaine Patricia Balme, dont ni les états de service, ni les compétences discutables ne justifient les émoluments colossaux qui lui sont versés.

Une autre partie de cette communication est du domaine réservé du présumé didactique Jacques Fame Ndongo, Ministre de l’enseignement supérieur, dont les lyrismes intermittents en qualité de chargé de communication du RDPC ressemblent davantage à des thèses de linguistique qu’à des messages politiques destinés à être assimilés et compris par le commun des mortels. La dernière partie de ce vaste chantier de la communication, la plus congrue, revient au transfuge Issa Tchiroma, hier encore « opposant », aujourd’hui porte-parole du gouvernement et accessoirement Ministre de la communication.

Ce ministre que son errance et sa transhumance politiques de l’opposition vers la « majorité présidentielle » et inversement, disqualifient d’être porte-parole d’un gouvernement qu’il a combattu pendant des années semble être réduit au rôle de spectateur, dans une affaire dont il aurait du être l’un des acteurs principaux. En fait, cet illustre clone politique de l'inutile Bello Bouba, lui aussi ayant bénéficié d’un maroquin, est un personnage médiocre dont on ne peut malheureusement s'empêcher de penser que son silence enrichirait la vie républicaine et rendrait service à la démocratie.

En définitive, nous affirmons que « la pensée devrait être une vigilance continuelle » et la réflexion une urgence pour les proches collaborateurs du Chef d’état camerounais. Il s’agit d’intégrer la dimension ternaire de la réflexion qui conjoint, contextualise et enfin simplifie. Dans la sphère de la communication politique consubstantielle des canaux et du message véhiculé, elle donnerait de la cohérence et du relief à l’action gouvernementale en permettant d’opérer des arbitrages adaptés aux circonstances et à l’époque contemporaine.

C’est pourquoi on est en droit de se demander si les auteurs de la correspondance au magazine Le Choc ont réfléchi, mesuré, évalué et anticipé les impacts de leur « droit de réponse », instance dont ils gagneraient à user avec beaucoup de subtilité et discernement. Nous disons que, quand on prend le risque d’instrumentalisation d’un quasi fait divers, pour poser un acte politique aussi important il faut en mesurer les conséquences au préalable.

Nous pensons que dans le cas qui nous préoccupe et qui relève de la plaisanterie de bistrot, il eut été urgent d’attendre ou de déléguer aux services compétents. Nous en concluons qu’il y a faute et surtout faute politique. Martin Belinga, eu égard à son rang, n’est ni l’interlocuteur, ni l’intercesseur indiqué dans ce « conflit » de pacotille. La diplomatie est une posture, la communication, une attitude.

Correspondance d'Oscar Gabriel Mollah.


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