La chaîne de télévision française France 2 a diffusé hier la première partie d’un reportage intitulé « Françafrique, les raisons d’Etat » dans le cadre de l’émission infrarouge. Un reportage saisissant qui opère un réel cours d’histoire sur l’époque post-coloniale des pays d’Afrique noire.
On y verra des témoignages d’anciens ministres, hauts-placés du gouvernement ou militaires ayant été connectés de près, voire de très près à ce qu’on a historiquement appelé la « cellule Afrique de l’Elysée ».
De Charles de Gaulle à Jacques Chirac – en tant que premier ministre – et François Mitterrand, le reportage retrace les comportements des différents gouvernements Français depuis la fin des années 50 à nos jours, vis-à-vis de l’Afrique.
Dans le cas du Cameroun par exemple, on y apprendra ce qui a poussé à la nomination d’Amadou Ahidjo, et la répression des leaders upcistes sera évoquée, avec notamment la mort très controversée de Félix Moumié.
Congo, Gabon, Côte d’Ivoire, toutes les colonies françaises sont passées en revue dans le documentaire qui a été tourné pendant plus d’un an par Patrick Benquet, qui dévoilera les actions de Jacques Foccart, Guy Penne, Jean –Christophe Mitterand et Charles Pasqua, sans doute les «messieurs Afrique » des indépendances à nos jours.
On verra aussi certains « utopistes », tels Jean François Cot ou Pierre Marion, ayant tenté d’assainir les réseaux liant la France à l’Afrique, mais démissionnés en moins de deux ans.
Saisissant, le reportage opère un véritable rappel sur des thèmes désormais bien connus, et déjà traités sur Bonaberi.com, notamment avec :
- Pourquoi l’Afrique se meurt-elle ?, de François Xavier Verschave, auteur aussi de Négrophobie et de La Françafrique, où il dévoile autrement plus en détail que le documentaire précité.
- Autopsie d’une indépendance, documentaire d’Arte qui décrit sans tabous la période sanglante qui aura entouré l’indépendance camerounaise, avec Pierre Messmer en homme d’action de la France
- L’assassinat de Félix Moumié, qui étudie les conditions de la mort de l’ancien résistant upciste.
Sur les faits historiques, le reportage n’apporte dans sa première partie aucune nouveauté criante, mais innove en ceci qu’il apporte les témoignages express de personnes réellement impliquées dans la Françafrique ; il est néanmoins à considérer avec un certain recul, car exagérant parfois les actions de la France en Afrique : dans le conflit interne au Nigeria ayant entraîné le massacre des populations biafraises, la France est décrite comme ayant opéré de main de maître dans ce qui finalement n’a été qu’un coup de main ayant attisé des conflits déjà existés et commandités en interne.
Dans la lignée, la responsabilité et les choix des dirigeants africains sont un peu trop mis en recul pour emphatiser l’image d’une France tirant les ficelles ternit légèrement la pertinence d’un documentaire tout de même très instructif, même si on aurait souhaité voir le cas du Rwanda abordé.
Le dernier point d’analyse sur la pertinence du documentaire est l’actualité des phénomènes décrits, qui datent d’une ou plusieurs décennies, et qui ne décrivent plus forcément une réalité criante : on aurait par exemple du mal à imaginer Nicolas Sarkozy demandant à ses collaborateurs de choisir le successeur de Paul Biya, en demandant qu’on choisisse n’importe qui, « pour peu qu’il sache lire et écrire ».
Vous pouvez revoir le documentaire en streaming à cette adresse. Le second épisode, « Françafrique, l’argent roi, sera diffusé Le 16 Décembre.
|
