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Cameroun - élection : Chronique d'une entourloupe présidentielle
(07/10/2011)
L'élection qui aura lieu Dimanche au Cameroun, derrière ses signes extérieurs de processus pleinement démocratique, n'est en fait qu'une vaste mascarade orchestrée par le chef de l'Etat
Par Rédaction Bonaberi.com
Dans deux jours, l’élection présidentielle camerounaise aura lieu au Cameroun et dans toutes les administrations diplomatiques camerounaises à travers le monde, afin de choisir qui sera l’homme fort du pays jusqu’en 2018.

Ce rendez-vous, attendu par beaucoup de désireux d’une alternance et d’un renouveau politique pouvant mener le Cameroun vers son émergence risque de décevoir beaucoup. L’espoir est né au sein des détracteurs du président Paul Biya à la vue de la conjoncture internationale, avec les printemps arabes et les coups de force opérés en Côte d’Ivoire et au Sénégal où Laurent Gbagbo et Abdoulaye Wade auront cédé face à la vindicte populaire, le premier refusant de céder le fauteuil présidentiel et le second tentant de modifier la constitution pour s’éviter le destin du premier.

Une conjoncture qui a fait penser qu’il n’était plus possible de manœuvrer et de se faire élire et réélire à sa guise en Afrique, et fait penser qu’il y avait bien une chance que Paul Biya cède la main. Pourtant, habilement et sournoisement, Paul Biya s’est taillé une élection sur mesure, jouant sur le timing et profitant sans scrupules aucuns des ressources de l’état : résultat des courses, en deux ou trois mois, on sera passé d’un flou absolu quant aux échéances électorales, à l’annonce du vote de la diaspora, à la complétion de l’équipe constituante d’Elecam, à l’annonce de la date de l’élection et à l’enregistrement des candidats pour une campagne de 15 jours, rien que ça.

Partisan de la théorie du chaos, Paul Biya ne s’est pas contenté de plonger l’opposition dans le capharnaüm en jouant sur son pouvoir de décideur, mais a aussi joué sur les ressources financières pour dominer outrageusement ses adversaires : 3 milliards pour la campagne de communication du président sortant, contre 30 millions accordés par l’état aux candidats validés par Elecam, sachant qu’une seule moitié sera livrée avant l’élection.

Résultat des courses, les affiches « le choix du peuple » décorant fièrement le portrait de Paul Biya ont envahi les villes, pendant que les candidats de l’opposition pataugent péniblement dans les contraintes budgétaires. Jean de Dieu Momo déclarait que sa caravane de campagne à elle seule coûtait 500.000 francs CFA par jour, soit la moitié de la somme quotidienne versée par l’Etat.

De même, le gouvernement, normalement en exercice et devant plancher sur les grandes ambitions, bat outrageusement campagne pour le chef de l’Etat qui survole les débats. Les ministres de l’Economie, de la Santé, de l’Enseignement supérieur et bien d’autres envahissent les plateaux télé pour affronter les candidats. Cela donne l’impression à l’électeur moyen d’une machine de guerre bien huilée face à une opposition qui improvise et balbutie, et suggère subtilement l’idée que faire rempiler Paul Biya, ne serait pas si mal que ça. D’autant plus qu’en 6 mois, de nombreux projets des « grandes ambitions » ont été lancés, et on peut avoir peur de mettre une autre personne qui viendra d’abord remplir ses poches avant de penser à l’avenir camerounais.


En plus de ce pilotage à sa guise de l’élection, s’ajoute l’amateurisme (volontaire ou inconscient) de l’organisme électoral, Elecam. A travers les différents pays, les témoignages de fraude ou d’irrégularité surviennent tous les jours. « Ma mère a reçu trois cartes de vote : celle de mon père décédé il y a plusieurs années, et deux pour elle, une à Bonabéri où elle s’est inscrite cette année, et une à Edéa où elle a voté en 2004. J’ai moi-même retiré ma carte de vote et il y a erreur dans l’orthographe de mon nom », déplorait Jonas*, Camerounais vivant en France. Yvan nous confiait que lors des précédentes élections, sa mère et un groupement de pro-RDPC avait voté dans plusieurs circonscriptions différentes de l’Ouest.

Tout cela conduit à une méfiance et une lassitude relativement palpable chez les candidats comme chez les votants : Bernard Muna, candidat de l’AFP, affirme avoir rencontré des Camerounais avec plusieurs cartes d’électeur, et menace de se désister de la course à la présidentielle. Sur Internet, de nombreux appels au boycott fusent dans les boîtes mail des rédactions ou sur les réseaux sociaux. Albert Dzongang affirmait pour sa part qu’en cas de fraude avéré au jour de la proclamation des résultats, il demanderait au peuple de manifester et de contester vivement, mais pas violemment le résultat des votes. Un boycott qui ne pourrait que faire les affaires de Paul Biya, ceux tentés de se désister ou de boycotter les élections n’étant certainement pas des partisans du RDPC.

Quelques valeureux candidats de l’opposition essaient tant bien que mal de tenir le cap, et envisagent la thèse de scrutateurs, agents chargés de surveiller le déroulement des votes et d’estimer les résultats dans les différentes circonscriptions. Une ambition démesurée pour Dzongang, Jean de Dieu Momo ou autres, car à raison de seulement 2000 francs CFA par scrutateur, il faudrait près de 50 millions de francs en tout, 23800 bureaux de vote ayant été recensés dans tout le pays. Des moyens dont dispose le… RDPC.

Tout semble se dérouler donc comme sur des roulettes pour Paul Biya qui va certainement être réélu dans un processus démocratique façonné selon ses besoins. Quel scénario est à envisager ensuite ? Un retour à la normale pour chacun ? Un soulèvement populaire ? Une intervention extérieure ? Paul Biya a certainement pensé à cette option, et a déployé des quantités importantes de gendarmes à travers les grandes villes pour « protéger » le peuple depuis l’incident du pont du Wouri, où deux ou trois personnes avaient tiré quelques balles en l’air en demandant son départ.

*Les prénoms ont été changés.


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